Une loi qui porte atteinte aux libertés civiles et qui menace notre démocratie
18 mai 2012
Vendredi matin, les dirigeants de la FTQ, de
la CSN et de la CSQ ont condamné dans les termes les plus forts les
abus du projet de loi spéciale 78.
«Il est des plus clair, depuis le
dépôt du projet de loi spéciale hier, que le premier ministre du
Québec, Jean Charest, n’est ni le premier ministre de la Jeunesse
ni celui de la négociation, mais bien celui de la répression tous
azimuts. Comment expliquer notamment qu’il s’attaque avec virulence
aux enseignants, aux chargés de cours et au personnel de soutien
des cégeps et des universités, les traitant ni plus ni moins comme
des bandits et les visant comme s’ils étaient en arrêt de travail?
Nous ne voyons là que la poursuite des coups de force qu’il a faits
lors de la négociation du secteur public en 2005. Il est plus
habile à mener la répression que la négociation. Il s’agit plutôt
d’une législation qui a pour objectif réel de contrer tout
mouvement de contestation allant à l’encontre de la volonté
gouvernementale et non pas de rétablir un climat serein»,
selon les porte-parole syndicaux Michel Arsenault, Louis Roy et
Réjean Parent.
Il n’y a rien dans la loi qui comporte
minimalement les derniers éléments des discussions avec les
associations étudiantes et le gouvernement. Et, en aucun endroit,
il ne consacre d’aucune façon la primauté du droit à l’éducation.
Rappelons que la liberté d’association est un droit fondamental
reconnu tant par la Charte canadienne des droits et libertés que
par la Charte québécoise. Elle permet de formuler des demandes et
de dessiner un projet collectif. De plus, elle oblige une autre
partie à écouter et à prendre en considération ce projet collectif.
Ainsi formulée par la Cour suprême, elle contient également la
liberté d’expression et le droit de négociation. Il s’agit de
valeurs sur lesquelles est construite la société canadienne. Cette
liberté d’association s’exerce actuellement tant par les syndicats
que par les associations étudiantes. Le projet de loi spéciale
viole cette liberté fondamentale de plusieurs façons.
Dans tous les cas, il s’agit de s’interroger si le gouvernement a
soigneusement fait sa loi afin de porter le moins possible atteinte
aux droits fondamentaux. En l’espèce, il faut se demander s’il
existait d’autres moyens de retrouver une paix sociale et un retour
à l’enseignement. Or la négociation faisait partie de ces moyens.
Il n’y a rien dans la loi qui prévoit un mécanisme de négociation
entre les associations étudiantes et le gouvernement. Un tel moyen
aurait possiblement été plus propice à retrouver une paix sociale
et permettre le retour aux études. La loi n’est donc pas
soigneusement conçue pour atteindre ces deux objectifs, puisqu’elle
ne contient pas les moyens qui pourtant sont à la disposition du
gouvernement.
Il en est de même d’un moratoire, d’une trêve, d’une médiation. Ce
sont pourtant là non seulement des moyens disponibles, mais qui
plus est, ils permettent même la mise en uvre de la liberté
d’association dans sa dimension de droit de négociation ou
minimalement de droit d’expression.
L’arbre qui cache la forêt
En outre, les différentes mesures qui entourent la pratique de
manifester dépassent l’entendement. «Il nous apparaît que par son projet de loi,
le gouvernement déborde largement de la question étudiante. Une
fois adoptée, cette loi pourrait s’appliquer à toute manifestation,
même celles qui touchent des conflits dans le secteur privé ou
encore celles à caractères sociaux. Mais, plus important encore, ce
projet nous donne la mauvaise impression que ce qu’il cherche à
protéger avant tout, c’est l’absence de manifestation spontanée
lors de la prochaine campagne électorale», de soutenir les
porte-parole syndicaux.
Les représentants syndicaux demandent au gouvernement de retirer ce
projet de loi et de revenir à des valeurs plus socialement
acceptables en ouvrant la négociation avec les associations
étudiantes ainsi qu’un débat public sur les droits de scolarité et
le financement des universités. «Ce projet de loi semble vraiment rédigé sous
le coup de la colère et de l’animosité et, de toute évidence, elles
ne sont pas bonnes conseillères», de conclure les
porte-parole syndicaux.