Un PPP à quoi ça sert?
29 juin 2007
Le Syndicat canadien la fonction publique
(FTQ), entend démystifier les partenariats public-privé (PPP) et
les vertus qui leur sont trop souvent attribuées. À lheure où le
gouvernement Charest engage le processus dappel de qualification
pour fixer les conditions à respecter par les entreprises qui
construiront les deux méga-hôpitaux montréalais, le SCFP pose des
questions trop souvent passées sous silence.
«Nous sommes en train de nous
faire embarquer dans une croisade idéologique, lance Michel
Parenteau, directeur-adjoint du SCFP. Ceux qui pensent que ces méga-hôpitaux vont
nous coûter moins chers doivent aussi croire aux contes de fées.
Lexpérience vécue ailleurs au Canada ou en Europe est concluante,
ça ne sera pas différent chez nous.»
De
mystérieuses économies
Le plus grand syndicat des services publics au Canada cherche en
vain comment les PPP pourraient nous faire réaliser les économies
annoncées. Il met même au défi Monique Jérôme-Forget de démontrer
clairement comment ce mode de construction et de financement
pourrait faire sauver de largent aux contribuables, ce qui nie
même Pierre Lefebvre, le président de lagence des PPP.
À cet égard, un petit exercice de question-réponse élaboré par le
SCFP nous démontre bien que les promoteurs des PPP surfent sur le
mythe de lefficacité du secteur privé versus le secteur public.
Malheureusement pour eux, une telle affirmation ne résiste pas à
lépreuve des faits.
· Est-ce que le consortium privé qui réalise le projet en PPP
obtiendra des matériaux à plus bas prix? Pas plus que les
compagnies privées qui travaillent en mode conventionnel, car ce
sont les mêmes constructeurs.
· Est-ce que les ouvriers seront payés moins cher? Cest impossible
puisque les mêmes conventions collectives du secteur de la
construction sappliquent.
· Est-ce que le consortium obtiendra des taux dintérêts moins
élevés pour le financement des projets? Au contraire, les firmes
privées reconnaissent elles-mêmes quaucune organisation ne peut
négocier de meilleurs taux que lÉtat.
· Est-ce que largent investi ira directement aux infrastructures?
Les grandes firmes privées qui négocient ces contrats avec lÉtat
se réservent généralement une marge de profits de 10 à 20 % et
souvent plus. Des dizaines de millions sont ainsi détournés des
services de santé au profit de lointains et riches actionnaires.
· Nest-il pas préférable de voir une partie du risque assumé par
le consortium privé? Tout dabord, il est impossible de savoir sil
existe un réel partage des risques avant la signature du contrat,
dont les pourparlers sont toujours secrets. De plus, une compagnie
peut faire faillite comme cela sest déjà produit en
Grande-Bretagne, et cest alors le gouvernement qui ramasse les
pots cassés.
· Les délais et les coûts seront-ils respectés? Il ny a pas de
garanties. À Brampton en Ontario, le coût de lhôpital construit en
PPP a presque doublé, il a été livré avec un an de retard et il
était plus petit que le projet initial. Le même phénomène sest
produit pour le Royal Ottawa Hospital. À Londres, le coût de la
relocalisation de trois hôpitaux sur un site unique est passé de
770 millions à 1,7 milliard de dollars.
· À terme, est-ce que lentretien des bâtiments sera assumé avec
plus de soin? Sûrement pas. Tourner les coins ronds permet de
hausser les profits. De plus, dans les dernières années du contrat,
quel intérêt aura le consortium dinvestir dans lentretien et la
rénovation dun immeuble quil devra bientôt céder à lÉtat. Il
aura tout au contraire tendance à laisser à labandon des lieux qui
ne seront bientôt plus de sa responsabilité.
Pour le SCFP, il était dailleurs assez savoureux dentendre le
ministre de la Santé, Philippe Couillard, affirmer sans sourciller
que létat parfois lamentable de nos hôpitaux était le résultat
dun manque dinvestissements publics au cours des dernières
années. «Nous partageons
parfaitement ce point de vue! Cest la responsabilité de lÉtat
dassurer des soins décents et dinvestir dans nos
infrastructures.
Il nexiste
pas de raccourcis pour livrer des services de qualité.
Les PPP représentent des fuites
en avant qui nous coûteront plus cher, augmenteront notre dette
publique réelle et les bâtiments hérités par les générations
futures réclameront alors des investissements majeurs pour leur
remise aux normes», de conclure Michel Parenteau.