Trois mois déjà!
23 juillet 2007
Voici un
texte de Denis Bolduc, porte-parole des syndicats en conflit,
publié aujourd’hui dans le MédiaMatinQuébec.
« Le 22 avril dernier, après des mois de préparation, lentreprise
a finalement appliqué la recette testée à maintes occasions dans le
passé, notamment chez Vidéotron. Et la recette de Quebecor a ceci
de particulier: elle goûte et sent lintimidation, larrogance, le
mépris et le conflit à plein nez.
La liste des ingrédients est assez simple: un négociateur qui
respecte le mandat qui lui est donné de ne rien concéder et un
trottoir décoré dimposants agents de sécurité (qui se sont avérés
complètement inutiles dans notre cas) pour y placer les syndiqués
le moment choisi.
En fait, toute la complexité de cette recette repose dans sa
préparation. Elle nécessite, à grands frais, le recours à des
travailleurs de remplacement. Cette fois, Quebecor les a repêchés
et installés aussi loin quà Mirabel, Kanata (en banlieue dOttawa)
et même Toronto.
Et les 14 cadres embauchés juste avant le
conflit semblent persuadés dêtre investis de la mission de
canarder les syndiqués. «Nous vaincrons!» a dailleurs scandé lun
dentre eux, tel un oracle, au milieu du party de Noël réservé aux
cadres, en décembre dernier. Ce lock-out, on le voyait venir depuis
longtemps, mais on refusait de croire quune entreprise aussi
florissante (ayant des profits évalués à 25 millions par année ou
70 000 $ par jour) déciderait par elle-même de mettre ses
travailleurs sur le trottoir, tels de vulgaires sacs verts.
Après tout, même si lemployeur multipliait depuis des mois les
manuvres dintimidation, les travailleurs continuaient à faire
leur travail professionnellement sans exercer le moindre moyen de
pression. Pas un seul bris, pas de vandalisme, pas de pause
collective orchestrée, pas de menace de grève. Rien que du travail
fait avec minutie, dans le plus grand respect des lecteurs que nous
servions depuis 40 ans. Un lock-out décrété dans un tel contexte,
cest probablement du jamais-vu au Québec, ni même au pays.
Dans une entrevue au mensuel Alternatives, le mois dernier,
Marc-François Bernier, professeur au département de Communication
de lUniversité dOttawa, fait lui aussi lanalyse de
laffrontement planifié. «La
direction de Quebecor a essayé de recréer un conflit de travail
traditionnel, un affrontement classique entre syndicat et
patron, analyse-t- il… Elle pensait que ses employés allaient se
contenter de faire du piquetage, en plein milieu dun parc
industriel
«En fait, la direction de Quebecor a utilisé la
stratégie des gros bras, poursuit M. Bernier… Mais la stratégie lui a rebondi au visage. En
fait, tout ce quelle a tenté jusquici sest retourné contre
elle.»
Maintenant que tout le monde sait, que les masques ont tombé, que
plus personne ne doute du fait que Quebecor se préparait de longue
date, que lédifice du Journal de Québec a été transformé en
bunker, il ne reste plus quune chose à faire pour lemployeur.
Constater que la stratégie des gros bras est dun autre temps,
quelle na pas fonctionné et quil est grandement temps de revenir
à la table de négociations avec une nouvelle attitude, celle que
les syndicats du Journal de
Québec ont toujours eue, soit la recherche commune des
solutions.»