Deux poids, deux mesures? Les syndicats québécois plus qu’inquiets
10 décembre 2012
Sil fallait essayer de comprendre les dessous
du projet de loi C-377, déposé par le député conservateur
darrière-ban de la Colombie-Britannique, Russ Hiebert, qui
forcerait les organisations syndicales à divulguer de façon
détaillée leurs états financiers, il suffirait de citer les propos
du cofondateur et ex-président du conseil dadministration de
lInstitut économique de Montréal (IEDM), Adrien Pouliot, qui
saluait, il y a à peine un mois, le «courage» de Russ Hiebert
«qui a décidé de sattaquer aux
organisations les plus puissantes du pays: les syndicats» .
Derrière lhyperbole se cache la volonté de paralyser lactivité
syndicale et de laisser croire à la population que les
organisations syndicales ont des activités louches, quelles sont
antidémocratiques et quelles doivent être mises au pas. LAlliance
sociale presse les députés de toutes allégeances de voter contre ce
projet de loi.
Ce qui dérange
Les organisations syndicales dérangent le gouvernement Harper parce
quelles ont la capacité de sopposer à ses politiques et de
proposer dautres politiques, sur la base des mandats que leur
confient démocratiquement leurs membres, et aussi parce que leurs
combats ont produit des résultats dans le passé qui sont autant
dobstacles aux yeux des conservateurs à remodeler le pays comme
ils le voudraient.
Ce qui dérange cest que les syndicats défendent les milliers de
travailleuses et de travailleurs jetés sur le pavé, quils
réclament une ouverture encore plus grande à la syndicalisation et
quils veulent assurer la santé et la sécurité sur les lieux de
travail et voir respecter les droits du travail.
Ce nest dailleurs pas pour rien que le
projet de loi C-377 ne sen prend quaux syndicats, sans mettre de
lavant un traitement équivalent envers les associations de
médecins, davocats et dingénieurs, les organisations représentant
les intérêts des employeurs et du patronat, les chambres de
commerce, les think tanks
comme lInstitut Fraser ou lIEDM ou les partis politiques
fédéraux. Le parti pris ici est flagrant.
Transparence financière
Ce qui dérange également cest lignorance sciemment entretenue
vis-à-vis de la réalité. Les statuts des diverses organisations
syndicales prévoient tous, à un moment ou à un autre, la
présentation de bilan des affaires financières et obligent à une
vérification des états financiers par des bureaux accrédités et
externes de comptables. Plus que toutes autres, les organisations
syndicales sont tenues à la transparence en ce qui concerne tant la
définition de leurs objectifs que leurs activités et états
financiers.
De même, comme pour toute association sans but lucratif, tout
syndicat est tenu de rendre des comptes en vertu des lois fiscales,
tant à lAgence du revenu du Canada quà Revenu Québec. Les états
financiers sont ainsi divulgués en détail aux autorités fiscales
qui en vérifient la conformité.
Harper persiste et signe
Le gouvernement Harper est à la défense dintérêts bien précis qui
vont à lencontre de ceux de la vaste majorité de la population. Il
sapproprie la caisse dassurance-emploi. Il ferme des stations de
la Garde côtière qui assurent la sécurité sur les eaux. Il ferme
des centres de recherche et de sauvetage, mettant des vies en
péril. Il met en disponibilité des inspecteurs des aliments. Il
coupe les subventions aux groupes de défense des droits
démocratiques. Il bannit laide à la solidarité internationale. Il
tente de bafouer sans répit le droit à lavortement. Il sen prend
maintenant aux principales organisations qui défendent les
travailleurs, les travailleuses et les personnes plus démunies.
LAlliance sociale, comme les syndicats canadiens, dénonce ce
projet de loi inutile, discriminatoire et, selon un avis juridique,
anticonstitutionnel, puisque, sous le couvert de la fiscalité et de
la Loi de limpôt sur le revenu, il sattaque aux relations de
travail qui relèvent du champ de compétences des provinces. À ce
sujet, lAlliance considère que le gouvernement du Québec doit
intervenir pour dénoncer cette intrusion fédérale.
LAlliance sociale représente plus dun million de membres. Elle
regroupe l’Alliance du personnel professionnel et technique de la
santé et des services sociaux (APTS), la Centrale des syndicats
démocratiques (CSD), la Confédération des syndicats nationaux
(CSN), la Centrale des syndicats du Québec (CSQ), la Fédération
étudiante collégiale du Québec (FECQ), la Fédération étudiante
universitaire du Québec (FEUQ), la Fédération des travailleurs et
travailleuses du Québec (FTQ), le Syndicat de la fonction publique
et parapublique du Québec (SFPQ) et le Syndicat de professionnelles
et professionnels du gouvernement du Québec (SPGQ).