Plainte formelle au CRTC
5 avril 2002
Par télécopieur
(819) 994-0218
Montréal, le jeudi 4 avril 2002.
Mme Ursula Menke
Secrétaire générale
Conseil de la radiodiffusion et des
télécommunications canadiennes
Ottawa, Ontario
K1A ON2
Madame,
Le Syndicat des employés de TVA se tourne vers le Conseil de la
radiodiffusion et des télécommunications canadiennes en réaction à
la décision de TVA de mettre fin, sans préavis, à son bulletin de
sports de fin de soirée, le 25 mars 2002. Depuis ce soir-là, des
dizaines de milliers de téléspectateurs sont privés d’un service
auquel ils avaient auparavant droit gratuitement : un bulletin de
sports qui contribuait à maintenir une diversité de l’information
et du contenu télévisuel comme le stipule la Politique canadienne
de radiodiffusion :
«
la programmation offerte par le système canadien de
radiodiffusion devrait à la fois être variée et aussi large que
possible en offrant à l’intention des hommes, femmes et enfants de
tous âges, intérêts et goûts une programmation équilibrée qui
renseigne, éclaire et divertit. »
Dans ses arguments présentés au CRTC pour l’achat de Groupe TVA,
Quebecor Média affirmait que la transaction contribuerait
substantiellement à renforcer le système de la radiodiffusion
canadienne et à réaliser les objectifs de la Loi sur la
radiodiffusion.
Nous voyons mal comment le plus grand télédiffuseur privé au Québec
puisse atteindre ces visées alors qu’il enlève de sa programmation
un élément original. Qui plus est, les 20 minutes d’information
sportive de fin de soirée ont depuis été remplacées par des
infopublicités.
Le Conseil s’était inquiété de la part grandissante qu’occupait ce
genre de production à l’antenne de TVA lors du renouvellement de
licence de l’entreprise en juillet dernier. Dans sa décision
2001-285, le CRTC notait d’ailleurs :
« Le Conseil craint que cela se fasse au détriment de la
diffusion d’émissions régulières. »
Maintenant que les appréhensions du Conseil se concrétisent, nous
croyons qu’il est impératif dagir. D’autant plus que les
intentions de Groupe TVA sont claires et n’ont rien de rassurant.
Dans le journal Le Devoir du 2 avril 2002, le vice-président
Information et Affaires publiques TVA et LCN, Philippe Lapointe,
expliquait :
« Les priorités du réseau TVA en matière de programmation ce
sont vraiment l’information générale et les grandes séries de
fiction. Le sport c’est un public plus réduit, qui diminue, de la
même façon que nous ne faisons pas d’émissions jeunesse parce que
ce n’est plus une priorité et que de nouvelles chaînes spécialisées
jouent très bien ce rôle. »
Les employés de TVA sont inquiets devant de telles déclarations et
s’interrogent sur le sort qu’on réserve à des pans entiers de la
programmation du réseau de télévision généraliste pour lequel ils
travaillent. Maintenant que les émissions pour enfants ont été
écartées de la grille horaire et qu’aucun bulletin de sports digne
de ce nom n’est produit par l’entreprise sur son antenne
principale, qu’arrivera-t-il du reste de la programmation ? Est-ce
que la direction mettra au rancart linformation de fin de semaine
ou les segments d’émissions qui ne rapportent pas et dont le thème
est exploité par un ou des canaux spécialisés ? Le CRTC
laissera-t-il TVA épurer sa programmation jusqu’à ce qu’il devienne
lui-même une télévision spécialisée ? Ce n’était sûrement pas
l’intention du Conseil de dégarnir les télévisions généralistes, ni
de réduire la variété de l’offre télévisuelle gratuite en
autorisant le développement des canaux spécialisés. Du moins, nous
l’espérons.
La stratégie budgétaire et commerciale de Groupe TVA dans la
décision de saborder le bulletin de sports de fin de soirée nous
laisse aussi perplexes. Dans sa demande de renouvellement de
licence déposée en décembre 2000, TVA disait vouloir « Maintenir
son attrait comme télévision de proximité et de rendez-vous » et
» Accroître la force de son image de marque ».
Mais comment arriver à un tel résultat en coupant dans la
substance, en enlevant un « rendez-vous » pour les
téléspectateurs et en sabrant une partie de ce qui fait de TVA une
station généraliste visant à satisfaire les goûts de tous et chacun
?
Quebecor Média n’est-il pas en train d’affaiblir l’auditoire de sa
station phare qui dispose du privilège d’une diffusion sur ondes
hertziennes au profit d’une de ses stations spécialisées, LCN, en y
transférant les nouvelles de sports ? Le canal nouvelles n’est
disponible que sur le premier étage du câble, mais Quebecor calcule
peut-être y trouver son compte en augmentant le nombre de ses
abonnés ?
Le CRTC a le devoir de rassurer les citoyens québécois et canadiens
qui comptent sur le Conseil pour leur garantir que le bien public
que sont les ondes hertziennes est utilisé conformément à lesprit
de la loi et continue doffrir un accès gratuit à une pluralité de
sources d’information et à une programmation diversifiée. Le
Syndicat des employés de TVA estime que l’information sportive doit
faire partie de l’offre de services d’une station généraliste au
même titre que l’information politique, économique, culturelle ou
autres. C’est pourquoi il vous demande d’intervenir dans le dossier
afin que la politique de radiodiffusion canadienne soit respectée
et que la variété télévisuelle ne soit pas uniquement réservée à
ceux qui veulent et peuvent se permettre de payer pour les chaînes
câblées.
RÉAL LEBUF, président
Syndicat des employés de TVA
SCFP 687