Pierre Karl Péladeau et Quebecor dans les câbles
8 mai 2002
29/04/2002
Pierre Karl Péladeau pensait faire dans le câble en achetant
Vidéotron. Après deux votes de grève en deux jours, il se retrouve
plutôt dans les câbles, tel un boxeur bien mal pris. Ses employés
en ont gros sur le cur
Pour le comprendre, il suffit, comme nous
lavons fait, de rencontrer ces gens ordinaires qui font la
rentabilité de Vidéotron. PKP, qui se targue dêtre régulièrement
« sur le plancher », devrait être assez intelligent pour le
comprendre. Mais, il ne voit pas des évidences qui crèvent les
yeux.
À Québec, dans une salle comble, le SCFP 1417 a tenu son assemblée
sur les offres patronales du 16 avril. Pas moins de 331 membres ont
tenu à participer à cette assemblée, pour un taux de participation
de 91 %. Si on tient compte du fait que certains employés se
devaient dêtre présents au travail, on peut considérer que tout le
monde ou presque était là. Et ce nest pas les finales du hockey
qui ont pu rivaliser avec limportance de cette réunion.
Lambiance était à la bonne humeur. Certains membres portaient
fièrement des t-shirts affichant Montréal 99 %-Québec 100 %. Ce
vux a été réalisé. Les membres du SCFP 1417, les employés de
Vidéotron de lEst du Québec, ont effectivement voté à 100 % contre
les offres patronales et en faveur dun mandat de grève. Dans les
faits, un seul membre sur les 331 a annulé son vote (lannulation
dun vote ne brise pas lunanimité). Un tonnerre dapplaudissement
et de bravos a ponctué lannonce des résultats. Jamais na-t-on vu
des syndiqués aussi décidés.
Le combat de la classe moyenne
Tout le monde se souvient de la transaction fumeuse qui a permis à
PKP de mettre la main sur Vidéotron. Mais, qui se souvient des
groupes et personnalités qui ont appuyé cette transaction quand
elle fut soumise au CRTC? Les employés de Vidéotron qui ne le
savent pas déjà, seront heureux dapprendre quen mars 2001,
Quebecor se vantait davoir lappui de « 140 organismes et
intervenants publics » à sa demande de transfert des licences
de Vidéotron et TVA.
Parmi ces appuis, on retrouvait le Conseil du patronat du Québec,
la Chambre du commerce du Québec, le Forum pour lindustrie de la
télévision et du cinéma, lauteur Guy Fournier, le directeur des
Hauts Études Commerciales, Jean-Marie Toulouse, le titulaire de la
chaire de la Fondation Daniel Langlois en technologies numériques
et en beaux-arts de lUniversité Concordia, Hervé Fisher, et le
président de Sogestalt, Guy Latraverse. Il serait très certainement
intéressant dentendre aujourdhui toutes ces personnes, qui
gagnent plus quhonorablement leur vie, expliquer aux employés de
Vidéotron pourquoi ils devraient accepter de perdre leur emploi, de
voir leur salaire réduit de 35%, de perdre leurs fonds de retraite,
etc.
Si les offres de Vidéotron étaient acceptées, pour lEst du Québec,
en particulier la ville de Québec, cela signifierait la perte de
171 emplois. Pour l’ensemble de Vidéotron, la perte de plus de 1
000 emplois.
Pendant l’assemblée, à un certain moment, un membre est intervenu
et sest adressé à ses camarades de travail. « Moi, je vais
prendre ma retraite, a-t-il dit, on moffre 18 mois, mais ça ne
mintéresse pas, je ne veux pas que mes collègues se retrouvent
sans travail. »
Plus tard, une autre a lu un mot quelle avait composé la veille,
résumant bien le sentiment général à l’endroit de Pierre Karl
Péladeau. En voici un extrait : « Nous avons tous travaillé avec
ardeur et avec notre cur pour bâtir cette compagnie. Nous les
avons méritées ces conditions de travail, nous ne les avons pas
héritées, nous! »
28/04/2002
À Laval, assemblée historique du 2815
Vidéotron : c’est non à Péladeau à 99 %
La tension était palpable. La salle était bondée. Latmosphère
était survoltée. Dès 10 heures ce matin, plus de 1 500 membres du
SCFP 2815 sétaient engouffrés dans la salle du Palace. Yves
Lalonde, président du syndicat, sest dabord adressé à lassemblée
en leur disant quil était très impressionné de voir autant de
personnes réunies. Puis, il a demandé à lassemblée de tenir ses
délibérations dans lordre et le respect des opinions. Et cest
dailleurs à une assemblée très disciplinée que nous avons assisté
par la suite.
Point par point, les offres ont été présentées. Point par point, on
pouvait entendre les murmures et grincements de dents
À
lévidence, les plans que Quebecor réserve pour Vidéotron ne
suscitaient pas beaucoup denthousiasme parmi les employés.
Après avoir pris connaissance des offres patronales, les employés
du câblodistributeur se sont exprimés. Ce qui ressortait, cétait
le sentiment de se faire voler son emploi, une bonne partie de sa
vie et lentreprise rentable et florissante quils ont bâtie, tout
cela uniquement pour satisfaire les ambitions démesurées de Pierre
Karl Péladeau, notre multimillionnaire made in Québec.
« On mérite de vivre, davoir une maison et davoir un char
», sest exclamé une employée sous les applaudissements de la
foule. « Ça va au-delà de Vidéotron, a-t-elle aussi ajouté,
après ça, qui nous dit que lensemble des syndicats au Québec ne
sera pas visé? ».
« Les bonbons de lemployeur sont empoisonnés, en 2004 Vidéotron
va être devenu plus petit, accepter les offres, cest accepter de
perdre nos jobs dans 2 ans », a prévenu un membre. « 8% de
rien, ça ne vaut rien », a lancé un autre, faisant allusion à
la disparition de plusieurs emplois si les offres de lemployeur
devaient être acceptées.
Dautres y sont allés plus directement : « Jétais chez Entourage
et jai « switché » pour Vidéotron
. Je ne retournerai pas
chez Entourage! Mange de la m… Pierre Karl! » On a également
entendu : « Il y a du monde qui travaille depuis 20 ans, moi
seulement depuis trois, mais jamais Péladeau ne va senrichir sur
le dos des travailleurs qui ont bâti la compagnie! »
À lannonce des résultats du vote secret sur les offres patronales,
lémotion a monté dun cran. Plus de 99 % des membres ont voté
contre les offres patronales signées Quebecor. Mais, cest à 15 h
15 que lémotion était vraiment à son comble au moment où on a fait
part des résultats du vote sur le mandat dentreprendre des moyens
de pression, pouvant aller jusquà la grève illimitée. Là aussi,
lappui des membres à lexécutif syndical a atteint plus de 99 %!
Du jamais vu!
Visiblement ému du soutien exprimé, le président Yves Lalonde a
alors déclaré à la foule : « Je ne pensais jamais vivre ça un
jour! » Puis, il a rappelé que cétait « un message clair
» aux dirigeants de lentreprise. Enfin, il a conclu son
intervention en lançant un sérieux avertissement aux patrons de
Vidéotron : « Ne touchez pas à nos jobs! M. Péladeau, négociez
de bonne foi et M. Pouliot, nachetez pas un conflit de travail.
»