LA COUR SUPÉRIEURE DONNE RAISON AUX SYNDICATS!
14 janvier 2004
L’année 2004 commence bien pour les travailleuses québécoises !
C’est avec grande satisfaction que, le 9 janvier dernier, nous
avons accueilli le jugement de la Cour supérieure qui invalide le
chapitre IX de la Loi sur l’équité salariale. C’est le résultat
d’un long combat et du travail acharné de nos militantes. Dans sa
décision, la juge Carole Julien déclare inconstitutionnelle et
discriminatoire ce chapitre IX qui avait permis à plusieurs
employeurs d’être exemptés des obligations prévues par la Loi.
«C’est une décision qui aura des conséquences positives pour des
milliers de femmes au Québec. Nous avons maintenant la possibilité
de bâtir de véritables programmes d’équité salariale», affirme
Annick Desjardins, conseillère syndicale responsable du dossier de
l’égalité au SCFP.
En effet, au moment de l’adoption de la Loi, des employeurs
affirmaient avoir réalisé un programme d’équité ou de relativité
salariale. Le chapitre IX permettait ce type d’exemption pour les
plans réalisés en 1996 ou avant, et la Commission d’équité
salariale avait rapidement accepté des programmes inadaptés ou
fictifs. Les organisations syndicales avaient été exclues de
l’élaboration de ces programmes, et – incroyable mais vrai – il
leur était impossible de contester les décisions de la Commission.
À ce propos, la juge souligne que le «législateur a donc
substitué au mécanisme d’enquête de la CDPDJ et à l’intervention
éventuelle du Tribunal des droits de la personne, un mécanisme
administratif qui évacue complètement la notion de concertation à
l’égard du résultat souhaité. Plus simplement exprimé, il élimine
une des parties intéressées.(?) On ne peut qu’éprouver un profond
malaise face à un processus où l’on évacue complètement une partie
dont un droit fondamental est affecté de façon définitive par une
décision dont le législateur prétend qu’elle ne la regarde pas.(?)
On leur retire le statut de personne concernée dans la discussion
dont elles subiront les effets. On peut difficilement concevoir une
atteinte plus grande à la dignité de ces personnes».
Mais, plus important encore, la juge vient d’indiquer clairement
que les travailleuses visées sont, dans les faits, victimes de
discrimination. Comme l’ensemble des femmes dans notre société
d’ailleurs. La juge explique que la «discrimination salariale
entre les hommes et les femmes existe. Elle s’insinue dans les
structures de rémunération. Elle contamine les exercices de
cohérence interne dans l’évaluation des emplois. Elle se perpétue
par référence aux lois du marché». Elle précise: «Il n’y a
pas d’autres motifs à l’existence du chapitre IX que la volonté
législative de préserver des exercices probablement incomplets ou
insatisfaisants quant au résultat en regard des exigences du régime
général.(?) Le Tribunal est convaincu, par preuve prépondérante,
que la Loi, en créant le régime d’exception du chapitre IX, a pour
résultat le maintien de l’écart salarial entre les hommes en emploi
et les femmes en emploi du chapitre IX». La loi n’a donc pas
été invalidée uniquement sur une question de forme, mais bien parce
qu’elle empêchait des milliers de femmes d’être reconnues à leur
juste valeur et d’obtenir justice.
Rappelons qu’il y a près de dix ans, le SCFP contestait déjà ce
chapitre de la Loi en commission parlementaire, bien conscient
qu’il pourrait servir d’échappatoire aux employeurs. Comme quoi, le
bon droit, allié à la détermination d’une équipe efficace, peut
venir à bout des lois les plus injustes et des employeurs les plus
radins.
Le gouvernement dispose maintenant de six mois pour réagir et
modifier la Loi. Divers scénarios sont possibles mais, en principe,
des dizaines d’employeurs publics, parapublics et privés se verront
forcés de refaire leurs devoirs.