Les fuites d’un PPP
24 mars 2008
«Ce sera
plus solide, plus rapide et mieux fait», clamait Monique
Jérôme-Forget lorsquelle vantait les prétendus mérites des
réalisations en partenariats public-privé (PPP). Ça ne semble pas
être exactement le cas du nouveau centre sportif de Sherbrooke. À
cause des fuites importantes, la patinoire a même été fermée
pendant quelques jours pour procéder au déneigement et au déglaçage
du toit. Des drains et quantité insuffisante et mal installés
seraient la cause des problèmes de structure. Une situation
dautant plus inquiétante lorsquon se rappelle que la même firme
privée, Axor, est responsable de la construction du futur centre
dentraînement du Canadien qui sest effondré à Brossard le 25
février dernier.
Voici lintervention effectuée la semaine
dernière par le syndicat des cols bleus de Sherbrooke pour
souligner les risques et les pièges inhérents des projets en PPP :
À deux reprises au cours de la
semaine dernière, lactualité a illustré pour nous ce que nous nous
évertuons à clamer depuis des mois : la ville de Sherbrooke a
commis une grossière et très coûteuse erreur en construisant le
centre multisports Rolland-Dussault en PPP avec Axor.
À Brossard dabord, la structure du centre dentraînement du club
de hockey Canadien, en cours de construction par Axor, sest
effondrée comme un château de cartes. Puis quelques jours plus
tard, le toit du centre Rolland-Dussault sest mis à couler, au
point où les activités de laréna ont du être interrompues et des
employés municipaux appelés durgence pour débloquer les drains de
la toiture. Il semble quAxor ait oublié que la neige et la glace
glissent
sur un toit de tôle et que Sherbrooke est une ville où
les quantités de neige annuelles sont particulièrement importantes.
Comme le toit de la section soccer est plus haut que celui de
laréna, ce qui sy trouvait a glissé pour aller bloquer les drains
de laréna, avec les conséquences que vous savez. Ce nouvel épisode
sajoute aux nombreuses fissures des nouveaux gradins de béton de
laréna. En principe, Axor doit remettre le centre Rolland-Dussault
à la ville de Sherbrooke dans 40 ans. Quen restera-t-il?
Ce qui choque dans cet épisode, cest lattitude dAxor à légard
de la sécurité des utilisateurs du centre. La compagnie a adopté
une attitude ironique et quelque peu condescendante envers le
représentant syndical qui a sonné lalarme, Mario Fontaine. Elle a
ensuite soutenu que la situation ne présentait aucun danger. Le
centre Rolland-Dussault a même été rouvert pendant quelques heures,
le temps de permettre la tenue dun match de hockey devant quelques
caméras. A-t-on ainsi mis la sécurité des jeunes joueurs en danger
pour une question dimage, de relations publiques? La question se
pose puisque aussitôt le match terminé les portes se sont closes et
le resteront pour plusieurs jours. Depuis vendredi dernier, des
équipes de déglaçage se succèdent sur le toit pour briser les 30
centimètres de glace qui sy sont accumulés. Mais il ny avait
aucun danger, clamait Axor. Quelle crédibilité devra-t-on désormais
accorder aux représentants de cette compagnie lorsquil sera
question de sécurité au centre Rolland-Dussault?
Axor et la ville affirment depuis le début de ce projet quil
sagit dune application du principe de lutilisateur-payeur. Les
analyses que nous avons réalisées démontrent pourtant bien que rien
nest plus faux. Si faux en fait que les sherbrookois paieront 3
fois le coût du centre à même leurs taxes, pour aboutir avec une
structure dont ils ont dexcellentes raisons de douter. La ville a
en effet garanti un taux dutilisation minimal et sest engagée à
louer des locaux dont le loyer augmentera constamment au fil des
années. Nous savons maintenant que les utilisateurs potentiels du
centre le boudent entre autres en raison des tarifs trop élevés. La
sécurité deviendra peut-être un nouveau motif dhésitation. Les
terrains de soccer ne sont utilisés quà 40 pour cent. À ce rythme,
cest lensemble des contribuables de Sherbrooke qui assumeront à
peu près seuls la facture. Qui dentre vous aurait signé pareil
contrat?
Il nous apparaît clair que la ville aurait dû, et devrait
désormais, conserver le plein contrôle sur ses constructions, afin
déviter que des entrepreneurs avides de réaliser le maximum de
profits ne tirent avantage dun contrat déséquilibré où les
obligations de lun dépassent largement les responsabilités de
lautre.
Un PPP est un contrat où vous navez plus rien à dire sur la
qualité des matériaux ou les méthodes de construction une fois que
votre signature y est apposée. Lentrepreneur a tout le loisir de
rogner à qui mieux-mieux afin de gonfler sa marge. Voyez ce que ça
donne à Sherbrooke. Attendez-vous maintenant à ce que des
poursuites sajoutent à la facture déjà trop salée de ce centre qui
aurait dû être construit sous la supervision de la ville, et
conformément aux normes de sécurité les plus élevées. Nous
naurions pas aujourdhui limpression de jouer dans un centre
sportif en papier daluminium
Le syndicat des cols bleus de la ville de Sherbrooke.