Les faits sont là: les PPP coûtent plus cher et sont moins efficaces
2 août 2006
Larticle ci-dessous, rédigé par le
président national Paul Moist, a été publié dans le National
Post du 27 juillet dernier.
Lorsque les faits ne cadrent pas avec la vision du lobby de la
privatisation, le lobby de la privatisation nen tient pas compte.
Devant la hausse des coûts et la diminution du niveau des services,
les défenseurs des partenariats public-privé (PPP), comme
léconomiste de la Banque TD Don Drummond («The P3-rebuilt city»
[La ville reconstruite en PPP], 26 juillet), ont commencé à
soutenir que, comme par magie, les gouvernements nont plus à
financer les PPP. Comme si cétait le secteur privé qui «payait»!
Larticle de M. Drummond fait suite aux propos de Gordon H. Homer
qui propose de modifier les règles de comptabilité pour réduire la
transparence et cacher les coûts plus élevés des PPP («Why not P3?»
[Pourquoi pas des PPP ?] National Post, 6 juillet 2006).
Au début, les partisans de la privatisation utilisaient le
«financement hors livres» pour cacher la dette publique
additionnelle créée par les PPP. Mais les comptables du secteur
public ont fini par découvrir lastuce. Puis, les privatiseurs ont
soutenu que les PPP coûteraient moins cher aux contribuables.
Maintenant, ils avouent quil nen est rien. Alors ils affirment
que les projets de PPP seront plus souples et imputables. Mais, au
contraire, le public se retrouve avec des coûts plus élevés et des
services réduits. En plus, linformation comptable de base reste
cachée en vertu de clauses de secret commercial.
Même la banque de M. Drummond a reconnu
dernièrement que les PPP coûtent en général plus cher que les
projets du secteur public, affirmant que «la crainte que les PPP
puissent coûter plus cher est justifiée [mais] ce ne sont pas les
coûts, mais bien lavantage net qui est le critère le plus
pertinent dans la décision» davoir recours ou non aux PPP.
Pourtant, les faits montrent quau Canada, en Australie et au
Royaume-Uni, les PPP aboutissent constamment à une hausse des coûts
et à une diminution des services.
On estime quun hôpital en PPP de Brampton, en Ontario, a coûté 124
millions $ de plus uniquement pour les frais demprunt au secteur
privé. Une entente de PPP entre Philip Utilities et la ville de
Hamilton a exigé des mois de négociation et les frais
administratifs et juridiques annuels du maintien du projet ont été
budgétés à 200,000 $. Ce chiffre équivaut à environ 30 pour cent
des économies annuelles totales promises par lentreprise. Et il y
a dinnombrables autres exemples.
Le vrai problème, pour le lobby de la privatisation, cest que le
public commence à se rendre compte que les PPP coûtent plus cher et
donnent de moins bons résultats. Et cest sans doute ce qui
explique le regain des efforts de promotion des PPP, que lon vante
maintenant comme la «solution» au déficit de linfrastructure
municipale.
Le lobby de la privatisation a bien du pain sur la planche.
Statistique Canada a montré récemment que chaque dollar investi
dans des projets dinfrastructure publique donne en moyenne 17
cents déconomies par année aux entreprises canadiennes, un
rendement meilleur que pour les projets du secteur privé. Mais ce
fait dérange, alors les défenseurs des PPP le balaient sous le
tapis.
Finalement, la principale responsabilité du secteur public ne
devrait pas être de subventionner des sociétés du secteur privé par
des projets à haut rendement et à faible risque, ni à tirer du
pétrin des entreprises privées en difficulté. Pourtant, cest bien
à cela que servent les PPP.
La plupart des PPP ne transfèrent aucun risque au secteur privé,
puisque le gouvernement sera toujours là pour ramasser les pots
cassés et parce quil na dautre choix que dassumer le coût des
services garantis à ses citoyens. Lidée de base des PPP, cest que
le secteur privé veut des garanties de rendement élevé pendant que
les contribuables se retrouvent avec tous les risques.
Qui a assumé le risque à Hamilton? Ce sont les citoyens, car
lentreprise a changé de propriétaire à quatre reprises. Le PPP a
été responsable du pire déversement dégout de toute lhistoire du
lac Ontario. Le coût total du nettoyage et les détails des efforts
déployés par la ville pour tenir la société responsable sont
secrets. Les systèmes de distribution deau potable et de
traitement des eaux usées sont maintenant revenus à linterne.
Il est vrai que les municipalités sont aux prises avec des
contraintes budgétaires, mais cette situation est due en grande
partie au fait que les transferts fédéraux et provinciaux aux
municipalités sont passés de 26 pour cent de leurs revenus en 1995
à 17 pour cent en 2005. Cette diminution représente environ 5
milliards $ de transferts à peu près le coût de la récente baisse
de 1 pour cent de la taxe sur les produits et services et cest
elle qui est la cause du véritable déséquilibre fiscal au Canada.
Le gouvernement fédéral pourrait éliminer le déficit
dinfrastructure en moins dune décennie en transférant aux
municipalités les montants de la baisse de TPS (qui sélèveront à
près de 10 milliards $ par année) au lieu daccorder des baisses
dimpôt qui profitent de façon disproportionnée aux riches.
Mais, encore une fois, certains faits ne cadrent pas avec la
privatisation.
Avant dentreprendre dautres PPP, les gouvernements canadiens
devraient mener des analyses coût-avantage pour comparer tous les
coûts et avantages offerts par les solutions de rechange. Ils
devraient cesser de compter sur les analyses inadéquates et
inexactes réalisées par des groupes pro-PPP, comme Partnerships BC,
et se fier plutôt à celles dorganismes objectifs, comme les
vérificateurs généraux.
Enfin, il faut renoncer à lillusion que les PPP sont ouverts,
transparents et responsables. Des groupes du secteur de la santé
ont dû mener une longue bataille judiciaire pour obtenir des
renseignements financiers de base sur un hôpital en PPP de
lOntario des renseignements qui auraient été facilement
accessibles si le projet avait été public. Et les conservateurs de
Stephen Harper, tout comme le parti libéral, ont rejeté
dernièrement nos propositions visant à accroître la transparence et
lobligation de rendre compte des contrats de privatisation et de
PPP dans le cadre de la Loi fédérale sur limputabilité.
Est-il étonnant que les Canadiens se méfient énormément des PPP et
du programme de privatisation des conservateurs?