Les croupiers s’adressent à la Cour supérieure pour forcer la Régie des alcools, des courses et des jeux à les entendre
25 janvier 2008
Nouvel épisode dans la controverse entourant
louverture des salons de poker. Les croupiers de Montréal,
Lac-Leamy (Gatineau) et Charlevoix ont déposé une requête à la Cour
supérieure pour forcer la Régie des alcools, des courses et des
jeux à les entendre. Cette requête demande à la Cour «dordonner à la Régie de convoquer les
croupiers pour quils puissent se faire entendre, et à la Régie, de
statuer sur les plaintes et la demande dordonnance de sauvegarde
déjà déposées.»
On se souviendra que les syndicats des
croupiers, tous affiliés à la FTQ, estiment que les salons de poker
récemment ouverts dans les trois casinos du Québec opèrent dans
lillégalité.
Le porte-parole des croupiers, Jean-Pierre Proulx, explique quils
nont dautre choix «que de
sadresser à la Cour supérieure puisque la Régie ignore tout
simplement les multiples démarches entreprises depuis le 7
décembre. Cest comme si on sadressait à un mur, a-t-il résumé.
Personne, absolument personne de la Régie ne répond à nos
procureurs.» Pourtant, un porte-parole de la Régie, Réjean
Thériault, semblait bien au fait des démarches entreprises par les
croupiers lors dune entrevue radiophonique diffusée à
CJRC-Gatineau le 10 janvier.
La Requête introductive d’instance en Mandamus déposée à la Cour
supérieure a été signifiée jeudi à la Régie et au Casino de
Montréal. Elle sera signifiée aux casinos du Lac-Leamy (Gatineau)
et de Charlevoix ce vendredi.
Rappel des faits
Le 7 décembre dernier, les
trois syndicats FTQ représentant les quelque 1450 croupiers des
casinos de Montréal, du Lac-Leamy et de Charlevoix déposent une
plainte à la Régie sur lillégalité de limplantation et de
lutilisation des tables de poker électroniques que la Société des
casinos entend opérer dès le 18 janvier. À ce moment-là, les
croupiers savent déjà que la Société envisage louverture des
salons de poker pour le 18 janvier.
La plainte déposée vise les «appareils de type Texas HoldEM fabriqués
par la compagnie PokerTek». Pour les syndicats,
limplantation et lutilisation de ces appareils sont «totalement illégales et vont à lencontre,
non seulement du Règlement sur les jeux de casino (c.S-13.1,
r.1.01), mais également à lencontre du projet damendement de ce
règlement qui fut publié dans la Gazette officielle du
Québec». On estime que, pour quun salon de poker soit
conforme à la loi, entre autres choses, les cartes doivent être
distribuées par un croupier. Au Québec, lexploitation de machines
à sous est encadrée légalement. Dans ce cas, le résultat dun jeu
sur une machine à sous doit reposer uniquement sur le hasard et ce,
même lorsque le joueur peut faire des choix, ce qui est loin dêtre
le cas avec les machines électroniques de poker. Il y a donc une
importante distinction à faire entre les deux.
Le 3 janvier, les avocats
des croupiers font une seconde intervention auprès de la Régie pour
lui rappeler lurgence dagir dans ce dossier.
Dès le 10 janvier, les
croupiers décident de dénoncer la situation sur la place publique
et dans les médias. Le même jour, sur les ondes dun poste de radio
de Gatineau, Réjean Thériault, un porte-parole de la Régie,
confirme les interventions de croupiers auprès de son organisme et
commente sur la légalité ou non des tables de poker électronique.
Il déclare que, «si jamais elles
[les machines] étaient utilisées, à ce moment-là, la plainte des
croupiers, peu importe doù elle vient, on va effectivement
enquêter si la machine est légale ou pas».
Le 14 janvier, devant
linaction de la Régie et limminence de louverture des salons de
poker, les procureurs des croupiers déposent une requête à la Régie
pour en empêcher louverture dans les trois casinos. La requête
sapparente à une procédure dinjonction. La Régie reste muette.
Le 17 janvier, dans un
communiqué de presse, la Société des casinos annonce que les trois
casinos offriront aux amateurs de poker «des machines à sous de poker Texas
Hold’em». Jusque-là personne, ni même la Société, navait
pensé désigner les machines à poker comme des machines à sous
On saperçoit alors que la Société a fait disparaître sur
lensemble de ses sites Internet toutes les références aux
«salons de poker» (qui
nécessitent la présence des croupiers alors que ce nest pas le cas
des machines à sous). Radio-Canada en fera dailleurs un excellent
résumé dans sa section Nouvelles-Web (www.radio-canada.ca/nouvelles/surLeWeb/2008/01/17/index.shtml). On y
apprend, entre autres, que différentes pages des sites Web de la
Société des casinos faisaient toujours référence aux salons de
poker le 15 janvier. Ces mentions ont donc été effacées entre le 15
et le 17, moment où les tables électroniques de poker deviennent
des «machines à sous de
poker».
Pour le porte-parole des croupiers, Jean-Pierre Proulx, louverture
de salons de poker avec les tables électroniques Texas HoldEM est
non seulement illégale mais contraire au mandat de la Société des
casinos, ce qui nest pas sans conséquence pour une région comme
Charlevoix durement affectée par les pertes demploi.
Sur son site Internet, la Société des casinos rappelle ainsi le
mandat quelle a reçu du gouvernement: «La Société des casinos du Québec a pour
mandat de procéder à limplantation de casinos au Québec et den
assurer la gestion. Les objectifs poursuivis par le gouvernement
sont principalement de créer des emplois, de doter le Québec
déquipements touristiques supplémentaires de classe
internationale, de générer une source additionnelle de revenus pour
l’État et, enfin, de récupérer des sommes importantes jouées par
les Québécois dans les casinos à létranger.»
En ouvrant ses salons de poker, les casinos tentent de créer une
situation de fait accompli. La Régie, dont un porte-parole avait
annoncé la tenue dune enquête, ne fait toujours rien. Aucune
réponse, aucune communication avec les procureurs des croupiers.
Les 24 et 25 janvier, devant ce fait accompli et labsence
de réponse de la Régie, les avocats des croupiers font signifier
une Requête introductive d’instance en Mandamus à la Régie ainsi
quaux casinos de Montréal, du Lac-Leamy et de Charlevoix.
Présentée en Cour supérieure, la requête demande dordonner à la
Régie de convoquer les croupiers pour quils puissent se faire
entendre, et à la Régie, de statuer sur les plaintes et la demande
dordonnance de sauvegarde déjà déposées.
Les croupiers
Rappelons que les syndicats des croupiers SCFP et TUAC affiliés à
la FTQ, représentent quelque 1450 croupiers et que 550 autres
employés des casinos de Montréal, du Lac-Leamy et de Charlevoix
sont aussi membres de la FTQ.