Les cols bleus répliquent à la Ville de Québec par deux mises en demeure et un préavis de grève
11 mai 2012
À Québec, les tensions entre la Ville et ses
employés cols bleus sont loin de sapaiser. Tels des coups de
semonce à ladministration Labeaume, le Syndicat des employés
manuels (SCFP 1638) a fait parvenir jeudi, par huissier, deux mises
en demeure à la Ville de Québec et, vendredi matin, un préavis de
grève à la ministre du Travail.
Deux mises en demeure
La première mise en demeure dénonce
une directive de la Ville, datée du 20 avril, qui prétend
«limiter» la prise de
vacances des employés. Pour le Syndicat, cette directive
«représente une mesure de
représailles contraire à larticle 14 du Code du travail et une
récidive du comportement que la Ville a adopté récemment dans le
dossier des cent-soixante-deux (162) mises à pied.» À défaut
dun retrait de la directive, le syndicat prendra «les recours judiciaires qui simposent en
pareil cas, et ce sans autre avis ni délai», peut-on lire
dans la lettre envoyée à la Ville. Rappelons que la Commission des
relations du travail (CRT) a déjà condamné la Ville pour
représailles envers ses employés le 26 avril dernier.
La seconde rappelle à ladministration municipale quelle doit se
conformer entièrement à la décision de la CRT. Celle-ci a
conclu à des «représailles» envers les syndiqués et
ordonné le retour au travail des 162 auxiliaires mis à pied à
«leur horaire habituel»
ainsi que le versement d’«une
indemnité équivalente aux salaires perdus en raison des mises à
pied illégales» décrétées par la Ville. En ce qui concerne
le retour au travail des auxiliaires, environ 85 cas sont
présentement en litige. Dans sa missive, le procureur du syndicat
écrit que la décision de la CRT «a fait lobjet dun dépôt au bureau du
greffe de la Cour supérieure de Québec». Elle a donc
aujourdhui la même valeur quun jugement de la Cour supérieure.
Un préavis de grève
Dautre part, ce matin (vendredi), le syndicat des cols bleus a
fait parvenir un préavis de grève à la ministre du Travail. Il
sagit dune première en presque 30 ans pour les cols bleus de
Québec. La grève touchera uniquement les heures supplémentaires des
employés manuels.
Lexercice du droit de grève dans les municipalités est encadré par
la loi. Aussi, il est à prévoir que la CRT (division des services
essentiels) convoquera rapidement les deux parties. En transmettant
son avis, le syndicat a déjà soumis la liste des services quil
entend maintenir, en dehors des heures régulières de travail. Le
grève ne peut survenir avant un délai de sept jours juridiques
suivant la transmission du préavis, dans ce cas-ci le 24 mai.
À compter de cette date, les cols bleus à
lemploi de la Ville vont donc entamer la grève des heures
supplémentaires. Il sagit dune grève légale pendant laquelle
toutes les dispositions prévues au Code du travail seront respectées,
notamment la garantie de maintien de tous les services essentiels
pour assurer la sécurité et la santé de la population.
Pour le syndicat, lapplication de ce moyen de pression, la grève
des heures supplémentaires, devrait favoriser loctroi de travail
aux employés auxiliaires.
Coups de semonce
Marc-André Dufour, le président du syndicat des cols bleus, précise
que les démarches d’hier et daujourdhui sont des coups de
semonce. «On espère quà la
Ville, certains personnes vont comprendre quon ne peut pas
constamment et impunément violer les lois, les règles et les
ententes en vigueur.»
Il rappelle que «le 28 mai 2009,
le maire a signé de sa main notre convention. Quand on appose sa
signature, cest pour la respecter. Depuis des mois et des mois, la
Ville se comporte comme sil ny avait pas de contrat de travail. À
ce rythme-là, la Ville risque de faire le tour de tous les
tribunaux du Québec». Il ajoute que «le seul endroit où le dossier va se régler,
cest à la table de négociation».
Rappel des faits
Les cols bleus sont au nombre denviron 1350 et nont pas exercé de
droit de grève depuis plus de 25 ans. Ils sont sans contrat de
travail depuis le 31 décembre 2010. Les négociations entre les cols
bleus et la Ville de Québec ont commencé en février 2011. Depuis,
13 séances de négociation ont eu lieu entre les parties, dont
quatre en présence dune médiatrice nommée par la ministre du
Travail. Les pourparlers entre les parties se sont rompus
abruptement le jeudi 12 avril quand les cols bleus ont découvert
une note interne du directeur général de la Ville préfigurant des
compressions à grande échelle. Tout en reconnaissant lexistence de
ce document, le maire Labeaume en a minimisé limportance, disant
quil ne sagissait que du travail « dun fonctionnaire », rien de
plus quun « document de travail ». Quoi quil en soit, le 17
avril, la Ville a tout de même procédé à la mise à pied de 162
employés auxiliaires. Cette manuvre a été contestée devant
la CRT qui a conclu quil sagissait dun lock-out
illégal et de représailles à lendroit des syndiqués
(http://www.crt.gouv.qc.ca/uploads/tx_crtdecisions/2012_QCCRT_0198_01.pdf).
Tout en notant que la population navait pas reçu les services
auxquels elle était en droit de sattendre, la CRT a ordonné le
retour au travail des 162 auxiliaires. Le 17 avril en soirée, plus
de 950 employés cols bleus participaient au vote secret et
accordaient à leur direction syndicale le mandat de déclencher la
grève au moment jugé opportun.
Sur les services essentiels
Depuis le 1er octobre 2011, la mission, les pouvoirs et l’expertise
du Conseil des services essentiels sont confiés à la CRT, au sein
de laquelle a été créée une division des services essentiels. Ce
transfert résulte de l’adoption, en juin 2011, de la loi visant à
restructurer certains organismes et fonds gouvernementaux (2011, c.
16). Ainsi, les compétences assumées par le Conseil des services
essentiels jusquen octobre 2011 demeurent inchangées, mais elles
sont maintenant exercées par la CRT.
Le SCFP
Comptant plus de 111,000 membres au Québec, le SCFP représente
environ 70% de lensemble des employés municipaux au Québec, soit
29,400 membres.