Le conseil d’administration du CSSS Québec-Sud se prononce ce soir
17 février 2005
C’est à la lumière d’une étude qu’il a
lui-même commandée que le conseil d’administration du Centre de
santé et de services sociaux Québec-Sud (CSSS) se prononcera, ce
soir, lors d’une assemblée publique, sur la relocalisation de la
Résidence Saint-Charles. Le projet traîne depuis plus de 10 ans et
la récente étude démontre qu’il en coûterait 34% plus cher, soit
56,6 millions de dollars si on devait recourir au partenariat
public-privé (PPP) contre 42,2 millions selon le mode
conventionnel.
Ça traîne depuis suffisamment longtemps
Pour André Benoît, président du syndicat des employés de la
Résidence Saint-Charles, le dossier a suffisamment traîné en
longueur. «Depuis 10 ans qu’on nous annonce un nouveau centre.
Les politiciens sont passés ici les uns après les autres pour nous
annoncer un nouveau centre, en général en campagne électorale. Le
dernier, c’était Jean Charest il y a deux ans. Ça suffit! Il faut
penser aux patients, ils sont présentement logés dans un endroit
vétuste, ils méritent mieux. L’étude est faite, la conclusion est
claire, a-t-il souligné, qu’on entreprenne le projet de
Saint-Charles en mode conventionnel, un point c’est tout.»
«J’ose espérer que les membres du conseil
d’administration vont prendre leur décision à la lumière de l’étude
qui démontre qu’il n’y a aucun avantage à procéder en PPP», a
déclaré René Roy, secrétaire général de la FTQ. Rappelons que, le
mois dernier, c’est la FTQ et son syndicat affilié, le Syndicat
canadien de la fonction publique (SCFP), qui ont rendu publique
l’étude sur la relocalisation de la Résidence Saint-Charles, suite
à une demande d’accès à l’information du président du syndicat
local des employés.
«Le dossier de Saint-Charles est très important, a encore
ajouté René Roy. Les pressions sont énormes sur les
administrateurs pour qu’ils favorisent les PPP. Quand on sait que
le gouvernement envisage 5000 nouvelles places en CHSLD [Centre de
soins et d’hébergement de longue durée] à la grandeur du Québec,
derrière le dossier de Saint-Charles se cachent des intérêts
financiers énormes qui, malheureusement sont contraires à l’intérêt
de la population québécoise.»
Le secteur santé du SCFP se prononce
D’autre part, réunis en conseil général à Québec ce matin, quelque
250 délégués syndicaux du secteur des affaires sociales,
représentant 20,000 employés oeuvrant dans la santé et les services
sociaux au Québec, ont demandé au ministre de la Santé et des
Services sociaux, Philippe Couillard, et à la ministre responsable
de l’Administration gouvernementale et présidente du Conseil du
trésor, Monique Jérôme-Forget, de renoncer aux projets de PPP dans
les CHSLD du Québec. Du même souffle, ils ont aussi demandé à ce
que l’actuel gouvernement procède rapidement, en mode
conventionnel, à la relocalisation de la Résidence Saint-Charles de
Québec. Parmi les arguments avancés, les délégations présentes ont
souligné que le recours aux PPP dans les CHSLD signifie une dépense
additionnelle d’un demi-milliard de dollars, sans aucuns avantages
additionnels pour les bénéficiaires.
L’étude comparative de la firme Mallette
À la demande du CSSS de Québec-Sud, la firme Mallette a mené une
étude comparative sur la réalisation du projet immobilier de la
Résidence Saint-Charles de Québec. Cette étude, intitulée Étude
comparative entre le mode de prestation conventionnel et le mode
PAPP, a comparé deux scénarios pour la relocalisation de la
Résidence Saint-Charles, un centre d’hébergement de 132 lits, un
centre de jour d’une capacité de 50 «clients» et un point de
service du CLSC Limoilou, d’une superficie totale de 12,880 mètres
carrés. Datée du 23 novembre 2004, l’étude a été rendue publique
par le SCFP et la FTQ le 20 janvier, suite à une demande d’accès à
l’information déposée par le syndicat SCFP local des employés de la
Résidence Saint-Charles.
Plus précisément, l’étude a comparé la réalisation de ce projet
selon qu’il serait réalisé en mode conventionnel (conception,
financement et exploitation par une agence publique) ou selon un
mode de partenariat public-privé (PPP) de type B.O.T. (Build,
Operate, Transfer), c’est-à-dire pour la construction,
l’exploitation et le financement par l’entreprise avec rétrocession
à l’agence publique au terme d’un contrat d’exploitation de 25 ans.
Dans cette dernière hypothèse, l’agence publique assume les soins
de santé et paye un loyer (frais d’utilisateur) à l’entreprise
privée qui opère et entretient le bâtiment. L’étude a consisté en
un sondage sur les attentes de plusieurs entreprises privées,
potentiellement intéressées par un tel projet en PPP.
Les conclusions de l’étude Mallette
Il ressort de l’étude que la construction et l’exploitation de la
Résidence Saint-Charles coûteraient 42,2 millions de dollars en
mode conventionnel ou 56,6 millions selon la formule PPP. Sur une
période de 25 ans, le coût de revient actualisé par lit serait de
l’ordre de 430,000$ en PPP contre 320,000$ en mode conventionnel,
soit 110,000$ de plus par lit!
Toujours selon cette étude, seule la combinaison de deux conditions
pourrait conférer un léger avantage à l’approche PPP. D’une part,
le partenaire privé devrait accepter de se contenter d’un faible
rendement de 5% et, d’autre part, les coûts de construction en mode
PPP devraient être réduits de 20% par rapport au mode
conventionnel. Cette seconde condition signifie que les normes de
construction actuelles (ex.: qualité des matériaux de construction,
dimension des aires de repas, etc.) ne pourraient pas être
respectées. Mais, dans ce cas, on ne compare plus ce qui est
comparable. Et on est loin des prétentions de la présidente du
Conseil du trésor qui a déjà affirmé que les constructions en PPP
seraient de meilleure qualité?
Le Service de la recherche du SCFP estime que l’intérêt de cette
étude va bien au-delà du projet de relocalisation de la Résidence
Saint-Charles. Le gouvernement a maintes fois répété qu’il envisage
jusqu’à 5000 places d’hébergement en CHSLD en mode PPP. Le projet
de la Résidence Saint-Charles pourrait servir de laboratoire à tout
le Québec. Dans cette éventualité, il pourrait en coûter un
demi-milliard de dollars de plus ( 5000 fois 110,000$) de procéder
en mode PPP.
Les analystes du SCFP estiment que cette surfacturation reste
conservatrice. «Malgré des hypothèses toutes aussi improbables
que favorables au PPP (sous-estimation du rendement attendu, du
taux de financement bancaire et des coûts d’exploitation), la firme
Mallette ne parvient qu’à démontrer que le mode conventionnel
(financement, propriété et exploitation par le secteur public)
demeure, et de très loin, plus avantageux qu’un PPP du point de vue
des contribuables.» Selon le SCFP, la note pourrait être encore
plus salée en fin de compte.
La firme Mallette et son mandat d’étude
Mallette est une firme qui offre divers services, entre autres, les
services-conseils. Elle opère surtout dans le marché de l’Est du
Québec.
Le SCFP représente quelque 20,000 membres dans la santé et les
services sociaux au Québec, dont les employés de la Résidence
Saint-Charles de Québec.