La présidente des fonctionnaires municipaux lance un appel au maire Tremblay pour préserver les services d’aide sociale
30 novembre 2006
Nous reproduisons ici la lettre envoyée par
Monique Côté, présidente du SCFP-429, au maire de Montréal, Gérald
Tremblay. Ce texte a également été acheminé aux grands quotidiens
montréalais.
Monsieur le Maire, pour sauver la face, vous abandonnez à Québec
un pouvoir dintervention primordial dans la lutte à la pauvreté et
à lexclusion sociale à Montréal.
Dans une ville qui sest toujours occupée de ses pauvres et dont
les besoins sont particuliers, la décision de ladministration de
Montréal dabandonner à Québec son service daide sociale
responsable des centres locaux demploi constitue un recul
inquiétant, inacceptable. Pour lensemble de la population et
particulièrement pour les plus démunis, cest un prix bien élevé à
payer pour la tenue de votre promesse de présenter un budget sans
hausse de taxes.
Cette année, pour la première fois, ladministration prévoit un
déficit de son service daide sociale. Au lieu de chercher à
éliminer ce déficit, vous préférez mettre fin à lentente conclue
avec le gouvernement québécois, en vertu de laquelle la Ville
assurait ce service, et vous laissez ainsi Québec le prendre en
main. Les employés municipaux de ce service, membres du SCFP,
sopposent catégoriquement à cette décision contraire aux intérêts
des Montréalais.
Qui sont les gens les mieux placés pour
répondre aux besoins spécifiques des Montréalais?
Faut-il le rappeler? Montréal nest pas une ville comme les
autres. Elle est la métropole du Québec et compte près de deux
millions dhabitants. En raison de sa situation particulière, elle
doit affronter des problèmes sociaux spécifiques.
À Montréal, pauvreté, itinérance, jeunes de la rue, violence,
prostitution, problèmes de santé, multiethnicité, isolement social,
toxicomanie, entre autres, sont des défis sociaux majeurs très
différents que ce soit par leur nature, leur complexité, leur
ampleur ou leur acuité , de ceux quon connaît ailleurs au Québec.
Quand la gestion, les orientations et les décisions relèveront du
gouvernement du Québec, quel pouvoir vous restera-t-il, monsieur le
Maire, pour agir dans ces domaines en fonction des priorités et des
intérêts de la collectivité montréalaise?
Les fonctionnaires municipaux de laide sociale de Montréal,
membres du SCFP, ont une connaissance unique des problèmes sociaux
tels quils se posent dans la métropole. Croyez-vous vraiment que,
vue de Québec, la spécificité montréalaise sera perçue aussi
nettement quelle lest ici?
Au fil des décennies, les fonctionnaires municipaux ont acquis une
expertise de premier plan, notamment en aidant les sinistrés et en
affrontant toutes sortes dévénements et de situations difficiles,
souvent critiques. Les crises du logement et du verglas, larrivée
massive des Kosovars, et tout récemment, le rapatriement des
citoyens dorigine libanaise ne sont que quelques exemples parmi
des centaines. Cette expertise particulière sest développée à
Montréal parce que cest elle qui est aux prises avec ce genre de
problème.
Ces mêmes employés municipaux ont tissé des liens étroits et
collaborent quotidiennement avec une multitude dorganismes
communautaires issus du milieu, ainsi quavec tous les autres
services de la ville de Montréal. Comment croire que toutes ces
énergies et ressources locales indispensables seront mieux
mobilisées et canalisées à partir dun ministère à Québec?
Par ailleurs, vous en conviendrez sûrement, les préoccupations du
Québec et celles de Montréal peuvent être très différentes. Celles
de Québec sont dordre monétaire, alors que Montréal doit
impérativement assurer une cohésion sociale. Rappelez-vous :
lorsque le gouvernement québécois a décidé de mettre fin aux COFI
(qui offraient les cours de francisation destinés aux immigrants),
cest à Montréal que les effets néfastes se sont fait ressentir,
pas en région. Lorsque le ministère a décidé de couper des postes
dans les centres locaux demploi, afin de mettre sur pied le centre
dappels en Gaspésie, Montréal a subi une baisse deffectif alors
que ce service ne convient ni aux immigrants allophones, ni aux
itinérants qui continuent de se présenter dans les CLE plutôt que
de téléphoner. Ne craignez-vous pas, monsieur le Maire, quen
laissant entièrement à Québec le gouvernail de laide sociale
montréalaise, les cas de ce genre vont se multiplier?
Les employés municipaux concernés et leur syndicat sont prêts à
collaborer avec ladministration de Montréal et le gouvernement du
Québec afin de trouver des solutions qui réduiront le déficit du
service et permettront de conserver aux Montréalais le contrôle du
meilleur outil à leur disposition pour affronter les nombreux
problèmes sociaux quils connaissent.
Monsieur Tremblay, revenez sur votre décision. Dans lintérêt des
Montréalais, le maire de Montréal doit rester un acteur dans la
lutte à la pauvreté et à lexclusion sociale, et non devenir un
spectateur. Retroussons nos manches.
La présidente
du Syndicat des fonctionnaires municipaux de Montréal,
Monique Côté