La Charte canadienne protège le droit de négocier collectivement
13 juin 2007
Vendredi dernier, une bonne nouvelle nous est
venue de Colombie-Britannique. Dans une décision très largement
majoritaire, la Cour suprême du Canada a reconnu que le droit de
négocier était protégé par la Charte. La cause portait sur le
Health and Social Services
Delivery Improvement Act, aussi connu comme le Bill 29, adopté en 2002 par le
gouvernement de la Colombie-Britannique et qui était contesté
notamment par le Hospital Employees Union (HEU), un syndicat SCFP.
Dans ce jugement de 150 pages, la Cour émet
des disponibilités pour analyser les mesures «matraques» de l’État
pour nier le droit de négocier collectivement.
En voici quelques extraits:
- La liberté d’association
garantie par l’al. 2d) de la Charte comprend le droit procédural de
négocier collectivement. Les motifs avancés dans des arrêts
antérieurs de la Cour pour exclure les négociations collectives de
la protection accordée par l’al. 2d) ne résistent pas à un examen
fondé sur les principes pertinents et devraient être écartés. (p.
4)
- Le droit de s’associer avec
d’autres en vue de la négociationcollective est reconnu depuis
longtemps comme un droit fondamental au Canada, qui existait avant
l’adoption de la Charte. On peut à juste titre considérer la
protection consacrée à l’al. 2d) de la Charte comme l’aboutissement
d’un mouvement historique vers la reconnaissance d’un droit
procédural de négocier collectivement. (p. 4)
- Reconnaître que le droit des
travailleurs de négocier collectivement est inhérent à leur liberté
d’association réaffirme les valeurs de dignité, d’autonomie de la
personne, d’égalité et de démocratie, intrinsèques à la Charte.
(pp. 4 et 5)
- Pour déterminer si une mesure
gouvernementale ayant des répercussions sur le processus de
négociation collective constitue une atteinte substantielle, il
faut examiner successivement deux questions: (1) l’importance que
les aspects touchés revêtent pour le processus de négociation
collective et, plus particulièrement, la capacité des syndiqués
d’agir d’une seule voix en vue de réaliser des objectifs communs
ainsi que (2) l’impact de la mesure sur le droit collectif à une
consultation et à une négociation menée de bonne foi. Si les
aspects touchés n’ont pas de répercussions importantes sur le
processus de négociation collective, la mesure n’enfreint pas l’al.
2d) et il se peut que l’employeur n’ait pas l’obligation de tenir
des discussions et des consultations. (p. 6)
Réaction du SCFP
«En renversant ses propres
décisions rendues il y a 20 ans, la Cour suprême du Canada a
éliminé dimmenses barrières qui se dressaient devant le mouvement
syndical du pays», a déclaré Paul Moist, président national
du SCFP, qui rappelait que la Cour suprême du Canada avait déjà
refusé de reconnaître que la négociation collective était protégée
par la Charte des droits et libertés du Canada.
«La Cour suprême du Canada a
ouvert une porte qui avait été fermée il y a vingt ans», a
affirmé Paul Moist. Il souligne que cette décision découle du
jugement rendu dans la cause Dunmore.
«Aujourdhui, la Cour suprême a
profité de cette ouverture et a affirmé que le droit des
travailleurs à la libre négociation est si important pour
lensemble de la société quil est protégé par la Charte des droits
et libertés.»
La Cour a déterminé que les dispositions des conventions
collectives relatives à la sous-traitance, aux licenciements et à
la supplantation étaient indispensables à la liberté dassociation.
Une ingérence importante dans la négociation collective sur ces
droits essentiels enfreint la liberté dassociation.
«Le SCFP est particulièrement
heureux que la Cour ait jugé que la Charte accorde la même
protection à la négociation collective que celle qui est prévue
dans les conventions internationales du travail ratifiées par le
Canada», a ajouté le président pancanadien du SCFP.
«La négociation collective est la
raison première de lexistence des syndicats, a pour sa part
ajouté Claude Généreux, secrétaire-trésorier national du SCFP.
La Cour a reconnu que la
négociation collective est protégée par la Constitution et cette
décision enchante le SCFP.»
«Désormais, les gouvernements qui
singèrent dans les conventions collectives librement négociées et
le droit à la négociation collective des employés devront justifier
leur geste en regard de la protection garantie par la Charte des
droits et libertés.»