FORUM SYNDICAL AU SOMMET DES PEUPLES : UNE MOBILISATION CONTINENTALE JAMAIS ÉGALÉE !
19 avril 2001
Québec, jeudi 19 avril 2001 « La participation de quelque
1 000 syndicalistes provenant des 35 pays de lhémisphère américain
au Forum syndical tenu mercredi, dans le cadre du deuxième Sommet
des peuples de Amériques, témoigne à elle seule de la formidable
mobilisation et, surtout, de la cohésion de plus en plus marquée
des organisations syndicales dans une démarche pour imposer le
respect des droits sociaux et économiques des millions de
travailleuses et travailleurs affectés par la ratification
éventuelle dun accord sur la Zone de libre-échange des Amériques
(ZLÉA) », a déclaré M. Marc Laviolette, président de la CSN et
porte-parole du Forum syndical.
Des affrontements sociaux à prévoir
« Il est clairement ressorti des interventions au forum que les
travailleuses et travailleurs sont pratiquement considérés comme
une marchandise dans le cadre des accords déjà existants, accords
qui serviront vraisemblablement de modèle de négociation pour la
ZLÉA.
Les gouvernements de lhémisphère américain se dirigent vers des
affrontements sociaux sils persistent dans leur volonté dévacuer
la question des droits sociaux et humains, des conditions de
travail et de vie dans la cadre des discussions multilatérales en
cours », a averti M. Laviolette.
Les maquiladoras ne doivent pas devenir la règle
« Nous naccepterons pas que le modèle des maquiladoras ou des
zones franches doù les lois du travail sont exclues deviennent la
règle dans des accords qui constitueraient un sauf-conduit
inacceptable aux pires abus.
Et nous ne sommes surtout pas dupes des promesses de redistribution
de la richesse faites à loccasion des accords déjà ratifiés, tels
lALENA ou le MERCOSUR. Les entreprises ont surtout profité de ces
accords pour à la fois sabrer dans leur main-duvre et dans les
conditions de travail », a ajouté Marc Laviolette.
Les services publics ne sont pas des marchandises
« Avec le Sommet de Québec, la donne est en train de changer quant
au maintien de services publics accessibles et gratuits. Déjà avec
leurs politiques dajustements structurels imposés dans de nombreux
pays de lhémisphère, la Banque mondiale et le FMI, avec la
bénédiction de lOMC, ont littéralement forcé la privatisation
partielle ou totale des services publics. Mais nous avons jusquà
présent réussi à limiter les dégâts par des clauses dexclusion.
« Nous avons toutes les raisons de croire que le modèle daccord en
cours de négociation pour la ZLÉA viendrait quant à lui consacrer
la tendance au démantèlement pur et simple des services publics
désormais considérés comme des subventions indues aux entreprises
locales et comme une barrière condamnable à la venue dentreprises
privées étrangères dans le domaine des services. Nous devons
réitérer haut et fort que les services publics ne sont pas des
marchandises », a pour sa part affirmé Mme Magaly Brito, de
lInternationale des services publics.
Non à lopacité des discussions
« Les gouvernements des Amériques auraient intérêt à sinspirer du
modèle européen de négociation en matière daccords multilatéraux,
un modèle qui nest pas parfait mais qui est tout de même inclusif
quant à lexpression des intérêts de la société civile et des
organisations syndicales et progressistes.
« Nous navons pas à tolérer collectivement lopacité, le refus de
participation sous une forme ou une autre de la société civile et
des organisations syndicales à des discussions qui scelleront le
sort, les conditions de travail et de vie de nos membres pour des
dizaines dannées », a fait savoir M. Michel Arsenault,
vice-président de la FTQ et directeur québécois des métallos.
Oui à une intégration continentale de nos solidarités
« Le Canada sest déjà auto-imposé des ajustements structurels en
se soumettant aux diktats de lOCDE et de lOMC, en adhérant
aveuglément aux dogmes de déficit zéro, de baisse massive des
impôts, en reniant ses juridictions par des règlements de litiges
imposés par lOMC comme ce fut le cas avec Ethyl corporation ou
comme ça risque dêtre le cas avec la plainte de la société
américaine UPS contre la Société canadienne des postes.
« Ces cas très concrets devraient sonner lalarme et, comme
syndicalistes, nous pousser à une intégration continentale et
planétaire, non pas du commerce, mais de nos solidarités, de nos
forces de résistance au nivellement par le bas de nos conditions de
vie, à une concentration toujours plus poussée de la richesse entre
les mains dun petit nombre dindividus.
« Nous constituons une force importante qui est en mesure de
contrer labdication des gouvernements devant des entreprises et
des organismes (FMI, BM, OMC, etc.) qui nont de comptes à rendre à
personne, qui ne sont aucunement imputables à la société civile. Le
message a été livré à Seattle, à Davos, à Santiago, à Nice et il le
sera à Québec
après-demain », a poursuivi M. Jean-Claude Parrot, vice-président
du CTC.
Le vernis du discours de la mondialisation est passablement
écaillé
« Pour reprendre dans la même veine que Mme Brito, je veux envoyer
un message clair aux prédateurs commerciaux de nos services
publics, particulièrement en santé et en éducation : nos services
publics ne sont pas à vendre ! Le choix de rendre ces services
accessibles, gratuits et universels a fait lobjet de débats de
société et ce ne sont pas dobscurs panels darbitrage de
différends commerciaux qui vont venir mettre nos services publics à
lencan de la mondialisation.
« Le vernis du discours des artisans de la mondialisation est
passablement écaillé. Il devient de plus en plus clair que le
modèle Bush, père et fils confondus, veut simposer comme la norme
universelle. Il nest pas question de remettre en question, sous
prétexte de compétitivité accrue ou dajustement aux grands
ensembles économiques issus daccords multilatéraux, la liberté de
choix des citoyennes et des citoyens quant au modèle de société où
ils veulent évoluer », a indiqué Mme Monique Richard, présidente de
la CSQ.
Nous ne pouvons plus reculer
« Le Sommet des Amériques qui débute demain à Québec dans une
atmosphère provoquée de psychose et de paranoïa, par la mise en
place de mesures de sécurité démesurées, est tout sauf le sommet
des peuples. Mais nous avons le droit dêtre optimistes car le
degré de résistance populaire et de compréhension des enjeux de
société en cause dans les tractations secrètes entre les
gouvernements des Amériques na jamais été aussi élevé.
« Les citoyens du monde entier ont peut-être retenu de Seattle les
vapeurs des gaz lacrymogènes dispersées par des forces de lordre
désorganisées et apeurées. À tout le moins, cest ce que les médias
leur ont transmis. Mais à Québec, par ce deuxième Sommet des
peuples, les véritables enjeux de la mondialisation ont été
largement couverts. Je tiens à en féliciter les organisateurs. Nous
ne pouvons plus reculer, il en va de notre crédibilité comme seule
force de résistance et de changement capable de redonner à la
société civile la voix qui lui revient dans un débat dont,
manifestement, on veut lévacuer », a repris M. Luis Anderson,
secrétaire général de lORIT.
Des engagements fermes
« Vous me permettrez, en guise de conclusion, de reprendre des
passages significatifs de la déclaration finale des participantes
et participants au Forum syndical tenu hier :
Des générations dhommes et de femmes syndicalistes ont lutté pour
que soient reconnus dans des textes les droits du travail. Les
grandes conventions internationales reconnaissent les droits
syndicaux comme des droits humains fondamentaux. La libéralisation
des échanges et la globalisation des marchés doivent donc être
soumises à leur respect.
En conséquence, nous, des organisations syndicales des Amériques,
revendiquons une intégration économique qui respecte les droits des
peuples et favorise lamélioration des conditions de vie et de
travail.
Mais nous plaidons pour un modèle dintégration qui favorise la
coopération des groupes de travailleurs et de travailleuses les uns
avec les autres plutôt que pour un modèle qui les met en
concurrence les uns contre les autres. Nous réclamons un système
qui subordonne la concurrence économique à latteinte de légalité
entre les peuples.
« Nous avons pris des engagements fermes lors de ce deuxième Sommet
des peuples des Amériques, à loccasion du Forum syndical, et nous
sommes condamnés à les respecter au nom des millions de
travailleuses et travailleurs que nous représentons dans nos pays
respectifs de même quau nom des exclus, des sans-voix et des
laissés pour compte dune négociation essentiellement commerciale
qui fait fi des fondements mêmes de nos sociétés démocratiques.
« Nous nous engageons donc à renforcer et à consolider le mouvement
syndical des Amériques pour en faire un acteur incontournable de la
coopération entre les peuples », a conclu le porte-parole du Forum
syndical, Marc Laviolette.