La facture dépasse aujourd’hui les 900 millions de dollars
12 juin 2009
Le projet dagrandissement et de modernisation
de lHôtel-Dieu de Québec coûtera au moins 935 millions de dollars.
La facture totale pourrait même frôler le milliard, si lon tient
compte des coûts additionnels des travaux de démolition, de
décontamination et de fouilles archéologiques. Cest la conclusion
principale à laquelle en arrive le syndicat des employés du CHUQ,
affilié au Syndicat canadien de la fonction publique, après avoir
recoupé plusieurs informations et avoir eu accès au programme
fonctionnel et technique (PFT) de lHôtel-Dieu.
Benoît Cloutier, président du syndicat,
sinquiète. «Si le projet avait
été conduit en mode conventionnel comme prévu à lorigine, le
chantier aurait été ouvert en août 2008, les ouvriers
sactiveraient et les travaux battraient leur plein. Mais
aujourdhui, rien ne bouge à lHôtel-Dieu. Depuis que le
gouvernement Charest a imposé le recours au partenariat
public-privé (PPP), le dossier traîne, les coûts augmentent. Dun
projet de 535 millions, nous nous dirigeons aujourdhui vers une
facture qui sera dans les 900 millions.»
Près dun milliard
Dans son état actuel, le projet dagrandissement et de rénovation
de lHôtel-Dieu prévoit deux phases. Une première phase, dune
durée de 18 à 24 mois, concerne les travaux de démolition, de
décontamination et de fouilles archéologiques. Elle est distincte
du PPP. Du côté syndical, on fait remarquer que «dans le débat public sur le coût du projet,
les sommes consacrées à la première phase nont jamais été
incluses».
Le 4 juin dernier, la direction de lhôpital et léquipe de projet
ont convié lensemble des employés de lHôtel-Dieu à trois
rencontres dinformation sur «les
grandes lignes du projet et ses impacts sur les activités de
lhôpital». Lors de ces rencontres, les employés ont été
informés que les coûts du projet en PPP sélèveraient à 735
millions, soit 100 millions de plus que ce que déclarait le
ministre de la Santé, Yves Bolduc, à lAssemblée nationale le 23
avril. Toutefois, fait remarquer Benoit Cloutier, «la somme de 735 millions correspond au coût
du projet (en PPP) dimmobilisation en 2007. Mais cette somme doit
être révisée pour tenir compte de la réalité de 2009 et elle va
nécessairement être revue à la hausse, denviron 200
millions, estime-t-il. On
parle donc aujourdhui dun PPP de lordre de 935 millions.»
Mais, dans un cas comme dans lautre, souligne le président, la
somme ninclut pas les coûts de la première phase. «Combien coûtent ces travaux de la première
phase, sinterroge-t-il, 20, 30, 40, 50 millions? Je pense que le
gouvernement devrait commencer par répondre à cette
question.»
Dautres problèmes à venir
Par ailleurs, les employés nourrissent dautres craintes. Selon
lestimation syndicale, tout au long des travaux, de 35 à 40 pour
cent du projet en PPP touchera directement les aires de service aux
patients. Comment alors se fera larbitrage entre la contrainte
imposée au responsable du PPP pour le respect de ses délais et
celle de lhôpital qui doit assurer la primauté des soins aux
patients? Et à quel prix? «Il
nous semble beaucoup plus simple, explique Benoit Cloutier,
que la direction du CHUQ reste
maître duvre de tous les travaux. En cas de problème, lhôpital
aurait ainsi les coudées franches pour prendre des décisions dans
le meilleur intérêt des patients.»
Une expertise reconnue et des
budgets respectés
Benoît Cloutier rappelle quil ny a pas de débat sur la nécessité
et lurgence de rénover et dagrandir lHôtel-Dieu. «Cest clair pour tout le monde, il faut le
faire, pour le mieux-être des patients et pour tous les employés.
Mais pourquoi sentêter à vouloir le faire en mode PPP. Au CHUQ, il
y a eu quatre projets denvergure, tous réalisés en mode
conventionnel, tous à lintérieur des budgets et à la satisfaction
du ministère: le Centre Mère-Enfant, le centre de recherche en
cancérologie, la rénovation de deux urgences. Lexpertise est là au
CHUQ. Le gouvernement na pas besoin daller courir la planète pour
se faire dire comment faire», plaide Benoit Cloutier.
Cartes sur table
Le président du syndicat des employés du CHUQ réclame du
gouvernement quil mette cartes sur table. «Prouvez-nous que cest une bonne affaire
pour les contribuables votre projet de PPP, lance-t-il comme
message aux politiciens. Le
projet de lHôtel-Dieu sera financé avec de largent public. Si
vous nadmettez pas nos chiffres, mettez les vôtres sur la table!
Le gouvernement libéral nous dit que cest une bonne affaire le
PPP. Si cest le cas, quon rende les chiffres publics. Ce
projet-là appartient à toute la population et on a le droit de
savoir ce quon fait avec notre argent.»
Rappelons quen 2008, ladministration du CHUQ favorisait la
réalisation du projet en mode conventionnel. Elle a été désavouée
aussitôt que lAgence des PPP fut saisie du dossier. Un scénario
similaire est dailleurs survenu à lhôpital Sainte-Justine, la
direction croyant que son projet se réalisait en mode traditionnel
jusquà quelques minutes avant lannonce officielle par le ministre
de la Santé. Au CHUQ, le directeur général de lépoque, René
Rouleau, estimait que la cure de rajeunissement de lHôtel-Dieu
paraissait bien difficile à concilier avec une formule en PPP,
selon ce que rapportait Le Devoir (30 avril 2008, p. A2).
Le SCFP représente quelque 20,000 membres dans la santé et les
services sociaux au Québec, dont 3600 au CHUQ.