Accord Canada-UE: plus de 130 organisations citoyennes réaffirment leur refus d’un accord désastreux pour les peuples et l’environnement
26 septembre 2014
Tandis que s’ouvre le Sommet Canada-Union
européenne qui se tiendra à Ottawa, au-delà de 100 organisations
sociales des deux côtés de l’Atlantique lancent aujourd’hui une
déclaration conjointe pour dénoncer l’outrageux déficit
démocratique qui enveloppe les négociations de l’Accord économique
et commercial global (AÉCG) entre le Canada et l’Union européenne,
et rejeter un projet d’accord qui accorde des pouvoirs démesurés
aux entreprises multinationales aux dépens des droits des
populations.
«D’une seule voix, nous rejetons
toute tentative du premier ministre Harper et ses homologues
européens de placer nos sociétés et nos parlements devant un fait
accompli. Les enjeux de cet accord sont tels qu’on ne peut accepter
qu’une poignée de technocrates décide de notre avenir sans qu’un
débat public, large et informé, puisse être tenu», a déclaré
aujourd’hui Pierre-Yves Serinet, coordonnateur du Réseau québécois
sur l’intégration continentale (RQIC).
La version consolidée fuitée à la mi-août 2014 confirme les
inquiétudes exprimées par les organisations: droits démesurés
accordés aux investisseurs, mécanisme d’arbitrage des différends
investisseur-État, libéralisation accrue des services et clauses
qui limitent le pouvoir des collectivités de réguler ou encore de
remunicipaliser des services publics, mise en danger de
l’agriculture paysanne, mécanismes de coopération réglementaire qui
contourneront la surveillance des instances démocratiques
«Les règles
de l’AÉCG minent le pouvoir des parlements et des gouvernements à
gouverner en fonction de l’intérêt public. Plusieurs chapitres de
l’accord restreignent la capacité de mettre en uvre de nouvelles
politiques publiques et sont bâtis de façon à ce que les lois et
règlementations favorisent exclusivement les intérêts du monde des
affaires», s’indigne Myriam Vander Stichele de SOMO,
organisation hollandaise membre du réseau européen Seattle to
Brussels, de visite présentement au Canada.
«La création de milliers
d’emplois est une fausse promesse. Cet accord aura un impact
négatif sévère dans plusieurs secteurs de l’économie, éliminant en
particulier des milliers d’emplois dans l’industrie maritime
canadienne alors qu’en s’attaquant aux Lois de cabotage on ouvre le
commerce intérieur aux intérêts étrangers», a affirmé James
Given, Président du Syndicat international des marins canadiens et
dirigeant de la Canadian Maritime and Supply Chain Coalition, créée
récemment pour s’opposer à l’AÉCG.
«Le mouvement d’opposition contre
les protections excessives accordées aux multinationales est en
expansion en Europe», a signalé Jörg Haas de l’ONG Campact en
Allemagne et qui accompagne les organisations canadiennes et
québécoises à Ottawa face au Sommet Canada-UE. «Même le Président
du Parlement européen, Martin Schulz, soutient qu’il ne voit pas
qu’une majorité soit possible au parlement autour d’un traité qui
inclut un mécanisme de résolution des différends
Investisseur-État», ajoute-t-il. Plus d’un million de
signatures ont été recueillies en Allemagne seulement contre les
deux accords transatlantiques que l’Europe négocie actuellement
avec le Canada et les États-Unis.
«On a sans cesse refusé tant aux
Canadiens qu’aux Européens de voir le texte officiel de l’accord et
d’en influencer le contenu, et maintenant on leur demande d’en
accepter la conclusion. Mais nous savons qu’une troisième avenue se
présente à nous, soit celle de dire NON à l’AÉCG et à tous les
accords qui sont négociés sans participation citoyenne. Et c’est le
choix que fait la société civile, des deux côtés de
l’Atlantique», a conclu Scott Harris, coordonnateur au
Canada du Réseau pour un commerce juste (RCJ-TJN).
Des centaines de manifestants se sont donnés rendez-vous sur la
Colline du Parlement à Ottawa, à midi vendredi, pour exiger un
débat public sur l’AÉCG et dénoncer de façon imagée les pouvoirs
que l’accord cherche à donner aux grandes entreprises aux dépens
des droits économiques, sociaux, culturels et environnementaux des
populations.
La déclaration transatlantique des mouvements sociaux est
disponible
En français, à http://rqic.alternatives.ca/spip.php?article149
En anglais, à http://www.tradejustice.ca/?p=637
Cette déclaration a reçu le soutien de mouvements sociaux
importants en dehors du Canada et de l’UE, dont l’Internationale
des services publics, une fédération syndicale de plus de 500
syndicats du secteur public dans plus de 140 pays, le Citizens
Trade Campaign, une large coalition aux États-Unis qui a contribué
à arrêter le fast track, et de nombreuses organisations en Amérique
du Sud qui ont bloqué avec succès le projet de Zone de
libre-échange des Amériques (ZLEA). Ce soutien constitue un pas de
plus vers une plus grande articulation des luttes sociales face au
modèle des accords de libre-échange et d’investissement, dont les
initiatives les plus récentes sont le Partenariat transpacifique
(PTP), le Partenariat transatlantique pour le commerce et
l’investissement entre l’UE et les USA (TTIP) et l’Accord sur le
commerce des services (ACS).