Près de 25,000 travailleuses réhabilitées dans leurs droits fondamentaux
31 mars 2006
Le Bureau international du travail (BIT) vient
de rendre une importante décision concernant deux lois québécoises
qui nient le droit à la syndicalisation de près de 25,000
travailleuses des services sociaux et de santé et des services de
garde à lenfance.
Rappelons qu’en décembre 2003, le gouvernement libéral de Jean
Charest a fait adopter à toute vapeur, sous le bâillon, les projets
de loi 7 et 8 qui ont désyndiqué des groupes de femmes oeuvrant
dans les services de garde à domicile et dans les ressources
intermédiaires et de type familial. Ces travailleuses soccupent de
personnes souffrant de déficiences ou éprouvant des problèmes de
santé mentale ou âgées. Ces lois forcent ces femmes à vivre des
rapports collectifs du travail du début du siècle dernier, un recul
méprisant et inacceptable.
Dans sa décision, le BIT condamne le
gouvernement du Québec et statue que ces deux lois privent des
milliers de travailleuses du statut de salariées au sens du Code du
travail, tel quétabli par les tribunaux du Québec, en leur
imposant le statut déguisé de travailleuse autonome. Pour le BIT,
«il sagit dans les faits dune annulation par voie législative
daccréditations existantes, ce qui est contraire aux principes de
liberté syndicale. Ces travailleuses devraient pouvoir bénéficier,
comme les autres travailleurs du Québec, des dispositions du Code
du travail ou jouir de droits véritablement équivalents.»
Le BIT demande ainsi au gouvernement damender ces dispositions
législatives, «afin que les travailleuses concernées puissent
bénéficier du régime général de droit du travail collectif et de
constituer des organisations jouissant des mêmes droits,
prérogatives et voies de recours que les autres organisations de
travailleurs, le tout conformément aux principes de la liberté
syndicale.»
Pour les leaders des grandes centrales syndicales (CSN, CSQ, CSD,
FTQ) qui ont porté plainte devant lorganisme international, «il
sagit dune sanction importante. Le gouvernement du Québec doit
maintenant se conformer à cette décision. Cest une question de
respect ! Il doit envoyer à lensemble de la communauté
internationale le message quil adhère aux valeurs démocratiques
qui doivent animer une société moderne.»
Cest ainsi que la présidente de la CSN, Claudette Carbonneau, et
les présidents de la CSQ, Réjean Parent, et de la CSD, François
Vaudreuil, ainsi que le secrétaire général de la FTQ, René Roy
demandent une rencontre avec le ministre de la Santé et des
Services sociaux, Philippe Couillard et la ministre de la Famille,
Carole Théberge.
Dans sa décision, le BIT sattend également à ce que les divers
jugements qui seront rendus par les tribunaux tiennent
«pleinement compte des principes de la liberté syndicale.»
Les grandes organisations syndicales contestent, en ce moment
devant la Cour supérieure, la constitutionnalité de deux lois qui
briment la liberté dassociation et le droit à la
non-discrimination des femmes, garantis par les chartes québécoise
et canadienne des droits de la personne.
En outre, le Québec demeure sous surveillance. Le BIT demande au
gouvernement et aux organisations syndicales de le tenir informé de
lissue des divers recours juridiques ainsi que de lévolution de
la situation sur les mesures prises pour mettre la législation en
conformité avec les principes de la liberté syndicale.
«Au lieu de senliser dans de longs débats juridiques, nous
demandons au gouvernement de se soumettre à ce jugement, de
respecter le principe de la liberté syndicale et de redonner à des
milliers de travailleuses les protections contenues au Code du
travail québécois et ce dans le respect des pactes internationaux
et des libertés fondamentales contenues notamment dans les chartes
des droits tant canadienne que québécoise», de conclure les
leaders syndicaux.
Au Québec, il existe actuellement près de 13 000 responsables de
service de garde en milieu familial offrant un peu plus de 84 000
places aux jeunes nfants. Il existe environ 11 000 ressources
intermédiaires et de type familial qui hébergent plus de 33 000
bénéficiaires.
Ces travailleuses et ces travailleurs à domicile nont aucunement
droit aux protections sociales et financières pourtant en vigueur
dans tous les secteurs dactivité au Québec. Ainsi, les heures et
la semaine de travail, les heures supplémentaires, le repos
hebdomadaire, les congés annuels, les jours fériés et les congés
pour événements familiaux, les recours en cas de harcèlement
psychologique ou de congédiement illégal et abusif ne sappliquent
tout simplement pas. De plus, ces salarié-es sont exclu-es de
lapplication de la Loi sur léquité salariale, des régimes publics
ou privés dassurance collective et de retraite. Enfin, elles nont
pas droit aux protections se rapportant à la santé et à la sécurité
du travail ni à une indemnisation en cas daccidents ou de maladies
professionnelles ni à des prestations dassurance-emploi.