Des ministres de la francophonie et le président de la FTQ se portent à la défense de Radio-Canada
21 octobre 2014
Lundi, les ministres responsables de la
francophonie au Québec, Jean-Marc Fournier, et en Ontario,
Madeleine Meilleur, ont interpellé le gouvernement conservateur en
disant que le sous-financement de Radio-Canada remet en question le
fondement même de la francophonie au pays.
Les deux ministres exprimaient leurs inquiétudes par rapport aux
vagues de compressions budgétaires qui ont été imposées au
diffuseur public par Ottawa.
Particulièrement inquiets par la couverture des nouvelles en
français, les ministres ont prié le gouvernement fédéral de
respecter la loi sur la radiodiffusion.
Même son de cloche chez le président de la Fédération des
travailleuses et travailleurs du Québec (FTQ), Daniel Boyer, qui
publie cette lettre ouverte à la défense de la Société
Radio-Canada.
Lettre
ouverte de Daniel Boyer, président de la Fédération des
travailleuses et travailleurs du Québec (FTQ)
Depuis l’arrivée d’Hubert T.
Lacroix à la tête de Radio-Canada, en 2008, les compressions se
succèdent à un rythme fou. Tous les deux ou trois ans, des
centaines de travailleuses et travailleurs sont licenciés. Depuis
six ans, la SRC a supprimé 2100 postes, soit plus de 20 % de ses
effectifs, et l’abolition de 1000 à 1500 emplois supplémentaires
est prévue au cours des cinq prochaines années. Bref, il n’y a là
rien de rassurant pour l’avenir de la culture francophone, de
l’information et de la démocratie.
Le ministre québécois des Affaires intergouvernementales
canadiennes et de la Francophonie canadienne, Jean-Marc Fournier,
se dit inquiet, et avec raison, pour le fait français au Québec
comme dans le reste du Canada. Au printemps, il a interpellé la
ministre du Patrimoine canadien et des Langues officielles, Shelly
Glover, sur la situation précaire du diffuseur public. La ministre
s’est dissociée des décisions de Radio-Canada – comme si les coupes
budgétaires 2012-2015 de son gouvernement n’étaient pour rien dans
le fait que le diffuseur public gratte les fonds de tiroirs…
Le gouvernement du Québec doit revenir à la charge auprès d’Ottawa
pour que Radio-Canada ait les moyens de continuer d’offrir une
information et des émissions pertinentes et de qualité. Le
personnel de la SRC offre un service essentiel en démocratie. Il ne
peut pas être sacrifié à chaque sursaut de l’économie!
Malgré les coupes des dernières années, Radio-Canada demeure un
tremplin pour la relève artistique, une institution phare du monde
de la culture, un lieu d’innovation télévisuelle. Malheureusement,
la SRC a annoncé la disparition de 11 de ses 12 studios
montréalais, une décision qui deviendra rapidement irréversible,
parce que liée au partenariat public-privé (PPP) de la Maison de
Radio-Canada. Radio-Canada a commencé à liquider une expertise de
plus de 75 ans qui sera impossible de rebâtir. Le temps presse.
En information, le diffuseur public est indispensable. Il constitue
un rempart important contre la concentration des médias alors que
le Canada a l’une des industries médiatiques les plus concentrées
du monde occidental. La SRC est aussi l’un des seuls diffuseurs à
faire du journalisme d’enquête, un genre essentiel à la démocratie.
Radio-Canada ne sera bientôt plus en mesure de faire tout cela.
La SRC a besoin d’un financement stable et prévisible pour pouvoir
réaliser son mandat tout en se modernisant. Le gouvernement
canadien doit suivre l’exemple d’autres pays démocratiques et
offrir un financement suffisant à son diffuseur public. Il ne sert
à rien d’envisager un virage numérique s’il n’y a plus de
journalistes sur le terrain pour rapporter la nouvelle… Le
président Hubert T. Lacroix dit vouloir prioriser le local et le
contenu canadien, mais s’il n’y a personne pour produire cela,
c’est voué à l’échec.