Les canards boiteux des PPP perdent leurs plumes
7 novembre 2009
Nous
reproduisons ci-dessous un court extrait d’une entrevue de Claude
Généreux, secrétaire-trésorie du Syndicat canadien de la fonction
publique, réalisée par Sébastien Goulet. On peut entendre
l’entrevue complète en cliquant ici.
SG:
Claude, quest-ce qui est arrivé aux partenariats public-privé
(PPP) pour que même les ingénieurs, les architectes et le patronat
se joignent à nous pour les contester? Est-ce quon peut parler
dun retournement?
CG: En effet, un très gros
retournement. Avant la crise, le privé allait dans des banques
emprunter de largent à un taux dintérêt déjà plus élevé que les
institutions publiques, comme les municipalités, les commissions
scolaires et les gouvernements. Ça ne paraissait pas trop, parce
que la différence variait de 0,5 à 1% de plus. Ça peut sembler
insignifiant, mais en termes de dollars, cest une grosse
différence. Donc, dès le départ, ce nétait pas une bonne affaire
que de recourir au privé pour financer les services publics. La
situation sest aggravée lannée dernière parce que le différentiel
est monté de deux, trois, voire quatre pour cent. Imaginez: quelque
chose qui coûtait 100 millions passe tout à coup à 200 millions.
SG: À part ce handicap du
financement, quelles autres raisons font des PPP une mauvaise
formule?
CG: Les PPP ont commencé à sinstaller dans la façon de
livrer les services dans les années 90 en arrivant avec une armada
darguments façonnés par le « PPPisme », une forme didéologie qui
prône le tout-au-privé. Un de ces arguments, cest que les PPP
seraient transparents. Mais on a vu que cest faux : les livres
restent fermés sous prétexte du secret commercial. Un autre
argument clé prétend quil y aurait un transfert de risque. Or, on
a vu depuis dix ou 15 ans de nombreux cas où le privé na pas
absorbé les risques. Un exemple révélateur est la Ville de
Hamilton, qui a transféré la régie de leau à une succession de
compagnies qui nont pas fait laffaire: une compagnie anglaise,
une compagnie américaine, une compagnie française. En bout de
ligne, leau a été confiée à une compagnie allemande qui a fini par
déclarer faillite. La Ville de Hamilton a été forcée de reprendre
le système dexploitation de leau en régie publique, ce qui lui a
coûté très cher. Un autre argument quon nous a servi, cest celui
de la souplesse. Les « privatiseux » disaient: « Regardez quand
cest en régie publique : vous avez des travailleuses et des
travailleurs qui ont des conventions collectives de 200 ou 300
pages! » Mais maintenant, même le maire Gérald Tremblay de Montréal
dit que les PPP sont des camisoles de force, parce quils ne
viennent pas avec des contrats de 300 pages: certains ont des
contrats de 10,000 pages! On a des vérificateurs externes et des
juricomptables dans les provinces canadiennes qui nous ont dit: «
Faites attention, on nen a pas pour notre argent et on sendette
pour longtemps, pour une ou deux générations. » Et il y a un
économiste américain de luniversité Columbia, Elliott Sclar, qui
nous a mis en garde en évoquant le scandale des « subprimes » qui a
fait tomber le capital financier mondial. Il a dit: «La prochaine bulle de ce genre, je crois que
ce seront les PPP.» Souhaitons-nous de ne pas en arriver
là!