Les gars sont prêts !
22 février 2008
Nous reproduisons cet article de Pierre Dubuc
avec l’aimable autorisation de l’Aut’Journal.
«Cétait en 2000. À la Baie-James
où je travaillais comme technicienne en télécommunication. Il
fallait élire quelquun à la présidence. Je lève ma main. Trois
gars font de même. Jai gagné avec 70% des votes. Je me suis
dit: « Les gars sont prêts »», me déclare Josée Durand, celle qui
jusque-là était considérée comme la «féministe de service».
En 2005, cest la présidence nationale du
Syndicat des technologues dHydro-Québec (SCFP 957) quelle
convoite. Elle fait face à des opposants de qualité. Néanmoins,
elle gagne avec 68% des voix lors dune élection qui se caractérise
par un fort taux de participation des 2500 membres de ce syndicat
dont à peine 5% sont des femmes.
«Les filles étaient
contentes», nous déclare avec fierté cette mère dun enfant
de trois ans et demi, dont le «chum» travaille à la Baie James
pendant quelle soccupe des affaires du syndicat à Montréal.
Josée se rappelle les batailles menées auprès de ses collègues pour
faire enlever les photos de filles nues dans les bureaux des gars,
mais surtout de celles auprès de la direction dHydro-Québec pour
avoir des bottes, des gants, des manteaux, des casques de sécurité
adaptées aux femmes.
Malgré les efforts déployés, elle reconnaît quil y a toujours de
la discrimination à lembauche. «Des femmes se font demander en entrevue si
elles ont peur de lélectricité!», raconte-t-elle en disant
ne pas trop comprendre pourquoi la question est posée uniquement
aux femmes parce que, lance-t-elle avec un grand éclat de rire,
«tout le monde devrait avoir peur
de lélectricité. Cest dangereux!»
Quelle se retrouve à la présidence tient évidemment à ses qualités
personnelles, mais aussi aux efforts déployés par ce syndicat pour
tenir compte de la situation spécifique des femmes. Ainsi, la
présidence que ce soit un homme ou une femme a droit à un
logement de fonction à Montréal. Les frais de garde sont remboursés
sil y a réunion le soir mais, surtout, on essaie de ne pas tenir
de réunion après 16h30.
«Cela sapplique aussi avec lemployeur, précise Josée.
On refuse de les rencontrer le
soir. Au début, ils rechignaient, mais ils ont compris.»
Lordinateur a remplacé le coffre
à outils
Avec les progrès scientifiques, le métier de technologue à
Hydro-Québec est en pleine transformation. «Le métier est plus cérébral, explique
Josée. Il y a plus dordinateurs
que de coffres à outils».
Beaucoup du travail peut maintenant se faire à distance, ce qui a
pour effet de créer des emplois à Montréal et en fermer dans les
régions. Contrer le phénomène est un des dossiers prioritaires de
la présidente du 957.
«Hydro, rappelle-t-elle,
nest pas une entreprise comme
une autre. Elle a une mission sociale, dont le maintien de lemploi
en région.»
Mais il y a aussi des raisons plus prosaïques. «Parfois, le système plante. Et il faut des
gens sur place pour débloguer le tout. Ça ne peut pas toujours se
faire de Montréal.» Cest un argument de poids pour le
maintien de lexpertise en région.
La valorisation du travail du technicien en région, mais aussi de
façon générale, est donc une priorité pour le syndicat.
«Le type de reconnaissance
inscrit dans notre convention collective date de vingt ans. Le
métier a évolué depuis», constate Josée.
Cette mise à jour est dautant plus importante que la relève de la
garde est en vue. «La moyenne
dâge de nos membres est de 49 ans. Plusieurs partiront à la
retraite au cours des prochaines années», nous dit une Josée
Durand dont lexemple servira sans doute à attirer plus de femmes
dans la profession. Des femmes qui nont peur ni des hommes
ni de
lélectricité!